10/03/2021
Il y a deux jours, c’était le 8 mars, journée internationale des droits de la femme, et comme mieux vaut t**d que jamais, WoMines souhaitait revenir cette date importante et sur ce qu’elle symbolise pour notre association.
Nous souhaitions tout d’abord rappeler que la ‘journée internationale des droits de la femme’ n’a absolument pas pour vocation à se transformer en ‘journée de la femme’. Il ne s’agit pas de célébrer une « féminité » socialement construite, de recevoir des attentions personnelles, mais bien de mettre en avant les acquis collectifs, sociaux, qui nous permettent de vivre dans une société de plus en plus égalitaire, et aussi de rappeler le chemin qu’il reste encore à parcourir, ce qui nous choque et nous atteint encore, comme ce qui nous donne de l’espoir face au sexisme.
Dans notre société actuelle, il y a en effet encore de multiples raisons d’être choqués, qui dépassent de loin le fantasme de victimisation que certains veulent prêter aux engagements féministes. Les blocages peuvent être constatés dans la sphère privée comme dans la sphère publique.
Aujourd’hui, selon l’observatoire étudiant des violences sexistes et sexuelles, en France, 1 étudiante sur 10 a subi une agression sexuelle, 1 sur 20 un viol ou une tentative de viol. Le système judiciaire a encore des progrès à faire pour mieux accompagner les victimes, hommes ou femmes, sans les culpabiliser (ex : récent post supprimé après coup de la police nationale pour « prévenir » et sensibiliser face au « revenge p**n » ). Les femmes sont toujours sous-représentées aux postes de pouvoirs politiques (voir les récents débats sur la parole des femmes à l’assemblée nationale), économiques (nombre de femmes PDG du CAC 40: aucune), médiatiques (proportions des « expertes » entendues dans les médias pendant le premier confinement: https://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2020/06/24/coronavirus-la-crise-a-conforte-la-place-desequilibree-des-femmes-dans-les-medias_6044058_3236.html ), culturels (ex : réalisatrices primées au festival de Cannes : 1 en tout). L’écart de salaire moyen entre un homme est une femme reste de 19% en France aujourd’hui. Travailler dans certains secteurs, tech, finance, politique, …, en échappant au sexisme, reste parfois difficile. En tant que femme, il n’est encore pas toujours évident d’avoir une parole publique aussi respectée que celle d’un homme (ex : https://twitter.com/LeaBalage/status/1364344701902536704?s=20 ), d’être valorisée pour autre chose que pour son physique (ex : pub sexiste, 2 % des rues portent des noms de femmes célèbres en France ), d’éviter les propos sexistes dans un cadre privé ou professionnel (campagne d’affichage de WoMines), voire les violences. Il n’est également pas toujours simple de j***r pleinement de sa sexualité face aux pressions sociales (ex : slt shamming : https://www.youtube.com/watch?v=9o3Rk3SAy7I ).
Les hommes sont également soumis à toutes sortes d’injonctions sociales, et seraient tenus à se conformer à un certain idéal « viril ». Gare à ceux qui seraient trop « faibles », « fragiles » ou « efféminés », car évidemment ce qui semble se rapporter à l’idée qu’on se fait du féminin, ou de l’homosexualité, serait, on se demande bien pourquoi, hautement dévalorisant. Ils seraient notamment soumis à la menace d’être mis au ban d’un marché sexuel concurrentiel, quasi "obligés", pour rester dans une « norme » imaginaire, de s’y intéresser. Enfin, ils sont souvent éduqués en étant incités à refréner leurs émotions et parfois certains de leurs intérêts, tout comme les femmes pour ce dernier point. Le sexisme peut aussi les atteindre (ex : photo du t-shirt spoted par pépite sexiste). Ils sont aussi victimes d’agressions sexuelles, et si la parole des femmes commence tout juste à se libérer, il reste peut-être encore moins simple de s’exprimer sur cela en tant qu’homme.
Contrairement aux clichés courants, beaucoup de féministes estiment qu’il est impossible de prétendre tendre vers plus d’égalité et plus d’épanouissement collectif sans interroger directement le modèle culturel du « masculin », tel qu’il est encore défini aujourd’hui, et les effets qu’il a sur tous, femmes, hommes, autres.
Loin de se constituer comme victimes passives, de prétendre opposer les droits et les acquis des hommes et des femmes, les associations comme WoMines ont bien pour visée de construire, d’agir, de proposer des alternatives à des faits sociaux qui freinent l’épanouissement humain. Nous ne voulons pas nous battre, ni contre des individus, ni, et encore moins, contre « les hommes ».
Cette approche est bien proprement « féministe » Pourtant, à WoMines, nous évitons d’employer ce terme, comme si cela était un mot grossier, inadapté, qu’il faudrait dissimuler sous le tapis alors même qu’il inspire chacune de nos actions. Comme si ce mot faisait peur.
Mais ce n’est pas « comme si ». Ce mot fait peur. Il est connoté. Il renvoie immédiatement à une foule de clichés : les féministes sont des femmes (si seulement autant d’hommes n’avaient pas aussi peur de se désigner comme tel ou de soutenir ouvertement ces causes, on avancerait au moins deux fois plus vite !), qui n’aiment pas les hommes, hystériques, défendant une pensée unique bien-pensante sans réflexion critique (or les courants féministes sont multiples et extrêmement divers, nourris par une réflexion sociologique et philosophique très large, leurs approches et les moyens d’actions s’opposent parfois), n’ont pas d’humour, brident la sexualité et la séduction (pourtant, quoi de plus libérateur que la sexualité lorsque chacun s’autorise à désirer et à être désiré, sans violence ou rapport de pouvoirs ?), nient toute différence entre les sexes (non, c’est juste que les normes statistiques ne doivent pas empêcher les individualités de s’épanouir, et chacun d’avoir les mêmes opportunités pour cela)….
En l’honneur de cette journée internationale des droits des femmes, nous n’avions qu’une envie : revendiquer l’utilisation de ce terme, et réaffirmer la volonté de notre association de montrer que ces clichés sur le « féminisme » sont des caricatures qui nuisent à la mobilisation pour l’égalité. Et également, souhaiter que les projets que nous portons mobilisent un maximum d’élèves, justement parce qu’ils sont construits pour permettre l’action, pour faire progresser tous ensemble notre société.
WoMines, une asso féministe