Asinamali

13/09/2024

Goût de Giorgio Agamben, traduit de l'italien par Paolo Bellomo et Cécile Raulet-Descombey, dès aujourd'hui dans les meilleures librairies grâce à l'équipe de

L’habitude veut que le goût soit le sens par lequel nous connaissons la beauté et jouissons des belles choses. Derrière l’imperturbabilité apparente de cet adage, Agamben met à nu l’ampleur, tout sauf rassurante, d’une fracture qui divise sans appel le sujet.
À la jonction entre l’acte de connaissance et l’expérience du plaisir, entre la recherche d’une vérité et la jouissance du beau, le goût semble être lié à un savoir que l’on ne sait pas et à un plaisir dont on ne jouit pas.
Dans la nouvelle perspective tant esthétique qu’économique ouverte par Agamben, se dessine une complicité inquiétante entre homo æstheticus et homo œconomicus et prend forme, dans toute sa fragilité, la question fondamentale de la théorie de la connaissance : qui est le sujet du savoir ? Qui sait ?
Il en ressort aussi, et ce par l’entremise d’Éros, une ode à la philosophie, dans laquelle l’« amour du savoir » ne peut qu’être aussi un « savoir d’amour », où le goût scelle l’enchevêtrement irrévocable de connaissance et plaisir, de savoir et jouissance.

10/09/2024

06/09/2024

En attendant notre prochaine publication, Goût de Giorgio Agamben (en librairie le 13 septembre), ici notre petit bloc de propositions pour naviguer en des eaux des plus en plus troubles :

- Tim Ingold, Machiavel chez les babouins
- Karen Barad, Frankenstein, la grenouille et l'électron
- Eleonora de Conciliis, Violence et métamorphoses
- Alberto Giovanni Biuso, Anarchisme et anthropologie
- Edoardo Sanguineti, La conscience de classe
- Carmine Mangone, Glisser une main entre les jambes du destin

29/08/2024

La table des matières de Frankenstein, la grenouille et l'électron de Karen Barad

1 - Performativité posthumaniste : cette matière qui compte (Posthuman performativity : how matter comes to matter)
2 - La performativité q***r de la nature (Nature's q***r performativity)
3 - Visions invertébrées : les diffractions de l'ophiure (Invertebrate visions Diffractions of the brittle star)
4 - Qu'est-ce que la mesure du néant ? Infinité, virtualité, justice (What is the measure of nothingness ? Infinity, virtuality, justice)
5 - Transmaterialities : Trans*/Matter/Realities and and Q***r Political Imaginings)

***r

22/08/2024

Pour ceux et celles qui ne l'auraient pas encore remarquée, ici quelques photos de la nouvelle édition tant attendue de Glisser une main entre les jambes du destin de Carmine Mangone. Nouvelle veste, même splendeur. Depuis quelques semaines disponible à la commande.

22/07/2024

Dernières retouches avant impression. Goût de Giorgio Agamben le 6 septembre en librairie.

10/04/2024

Qu'est-ce que le vide ? La moindre des choses que l’écoute du vide semble demander, c’est une attention extrême à chaque petit détail. Supposons alors que nous disposions d’un instrument très sensible, réglé avec une précision extrême, capable de zoomer sur le vide et d’être à son écoute. Mais que voudrait dire zoomer sur le vide, observer et écouter avec une sensibilité et une acuité de plus en plus grandes, accéder à une échelle de plus en plus fine et détaillée de … ? Hélas, il est difficile de concevoir comment s’orienter dans une telle tâche. Qu’est-ce qui définit une échelle de mesure dans le vide ? Quelle est la mesure du vide ? Comment même s’en approcher ?

Parlons du vide physique, le vacuum. Or, si le vacuum est l’absence de tout, de toute matière, comment être sûr que nous n’avons rien sous les yeux ? Nous avons besoin d’effectuer une mesure pour le confirmer. Nous pouvons utiliser de la lumière pour sonder le vide, par exemple, mais cela introduirait au moins un photon (un quanta de lumière) sur la scène, détruisant ainsi l’état physique que nous cherchons. Comme si l’on utilisait de la lumière pour observer l’obscurité ! Cela nous rappelle les conditions d’im/possibilité mutuellement exclusives dont il est question dans l’interprétation de Niels Bohr de la physique quantique.

Karen Barad - Frankenstein, la grenouille

15/03/2024

Il y a quelques années les textes de Carmine Mangone () étaient lus sur Station Station (), la radio de la Station gare des mines ().

Depuis les marges du sexe et du genre, du corps et des désirs, l'émission « les couteaux poétiques » chante la fronde.

Pour réécouter l'émission :
Les couteaux poétiques 25 ~ INSURRECTION POÉTIQUE

https://www.mixcloud.com/Station_Station_radio/les-couteaux-poétiques-25-insurrection-poétiques/

08/03/2024

« L'œuvre de Karen Barad est portée par un souffle et une élégance hors du commun : il prend la consistance d’une figure éminemment remarquable sur le fond assez insipide des pseudo-révolutions épistémologiques induites par la physique quantique. »

Yves Citton

« Frankenstein, le blob et l’électron apporte une
contribution fondamentale aux sciences stu-
dies, à la philosophie, à la théorie féministe et à
la physique – c’est bien rare qu’un livre puisse
faire ça. Il s’agit d’un livre important, ambitieux,
risqué et pourtant facile à lire : un de ces livres
que l’on savoure et avec lesquels on grandit. »

Donna Haraway

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05/03/2024

Le 11 octobre 2023, au Karen Barad et Emma Bigé conversaient passionnément autour de leurs pratiques de la vie. Virtualité, recherche d'affinités, mise en mouvement des corps, toucher : si vous avez envie de revoir la conférence, l'enregistrement vidéo de celle-ci est disponible sur le site du Centre Pompidou.

https://www.centrepompidou.fr/en/ressources/media/o6atW7O

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02/03/2024

Nous en avons parcouru, du chemin, depuis l’époque où, en 1610,on pouvait faire l’éloge d’un compositeur ainsi : « le célèbre Alfonso Ferrabosco, le plus artificiel de tous » ! Comme l’observe David Lowenthal, « le temps a renversé le sens du mot artificiel, qui ne signifie plus “plein d’art et de talent” mais “superficiel, convenu et presque dépourvu de valeur” ». De la même manière, un artefact n’est plus le produit original de la relation habile et sensuelle de l’artisan avec son matériau, mais la reproduction mécanique d’un modèle ou d’un concept préexistant. Cette déchéance de l’artisanat, réduit à l’exécution « purement technique » ou mécanique de séquences opérationnelles prédéterminées, est allée de pair avec la valorisation de l’art comme exercice créatif de l’imagination.
Par conséquent, l’artiste a radicalement tourné le dos à l’artisan, et l’œuvre d’art à l’artefact.

Selon Raymond Williams, cette rupture décisive s’est produite en Angleterre à la fin du XVIIesiècle, lorsque la Royal Academy, nouvellement instituée afin de réunir les praticiens des « beaux » arts que sont la peinture, le dessin et la sculpture, décida d’exclure les graveurs de ses rangs.
C’était symptomatique d’une tendance générale à séparer travail intellectuel et travail manuel, selon le même axe qui articule une série d’oppositions plus fondamentales entre corps et esprit, créativité et répétition, liberté et déterminisme.

Tim Ingold - Machiavel chez les babouins

-faire

16/02/2024

Unenouvelle étude montre qu’une espèce d’ophiure appeléeOphiocoma wendtii possède un squelette formé de cristauxqui fonctionne comme un système visuel et lui fournitapparemment les informations qui lui permettent de voirce qui l’entoure et d’échapper au danger. Son architectureest une source d’inspiration pour les scientifiques quiveulent construire des lentilles minuscules, destinées parexemple à l’ordinateur optique. L’équipe de recherchea découvert que les près de dix mille cristaux de calciteen forme de dôme qui couvrent son corps centralet ses cinq bras fonctionnent comme des microlentilles.Ces microlentilles collectent et canalisent directement lalumière vers les faisceaux de son système nerveux diffus.Étonnamment, ce sont les ophiures elles-mêmes quisécrètent la calcite (une forme cristalline de carbonate decalcium) et l’organisent pour fabriquer leur réseau optique.

Ophiocoma wendtii (en photo : Ophiodea de Ernst Haeckel, Kunstformen der Natur (1904)

Frankenstein, la grenouille et l'électron - Karen Barad

13/02/2024

Tandis que les compétenceshumaines nous semblent généralement appartenir à telle outelle tradition culturelle, nous imputons celles des animaux non humains à leur nature génétiquement codée et propre
à leur espèce. Mais que dire alors du tisserin mâle, dont le nid exige les nœuds et les boucles les plus complexes ? (...)
Le nid des tisserins est fait de longues bandes de feuilles de plantes déchirées, entrecroisées alternativement par-dessus et par-dessous à angle droit de manière à former un treillis régulier. Ces brins sont maintenus ensemble et fixés au substrat par diverses mailles et attaches dont certaines sont représentées sur l'image ci-dessus. L’oiseau utilise son bec exactement comme une aiguille à coudre et à repriser. Le moment le plus difficile est lorsqu’il doit enfiler le fil qu’il tient sous le fil perpendiculaire, de façon à pouvoir le faire passer ensuite sur le suivant. Il lui faut, pour ce faire, pousser la bande végétale sous l’autre, juste assez loin pour qu’il puisse ensuite la reprendre avec son bec et la tirer de l’autre
côté. Si l’extrémité libre est trop courte, la bande risque de revenir en arrière ; s’il la pousse trop loin, elle tombe par
terre. La maîtrise de cette opération demande une vraie
pratique.

Tim Ingold - Machiavel chez les babouins

27/01/2024

Certaines ophiures ont des bras bioluminescents qui continuent de bouger, de se tordre et d’émettre de la lumière même après s’être détachés du corps. Les biologistes marins y voient une tactique de survie efficace pour distraire les prédateurs pendant qu’elles s’échappent. Ce bras abandonné est-il simplement un fragment d’une structure organique-inorganique qui conserve un résidu d’« énergie réflexe », ou bien une véritable espèce compagne, capable de l’aider ? Si l’on considère les mouvements du bras détaché comme de simples réflexes, sur la base du fait que le fragment n’a pas de cerveau, qu’en est-il de l’organisme d’origine ? Puisqu’il s’agit dans son intégralité d’un matériau sans cerveau – véritable contestation vivante du binarisme organique-inorganique d’ailleurs –, devrions-nous en nier pour autant sa vivacité, son ingéniosité ou son intelligence ?

Karen Barad - Frankenstein, la grenouille et l'électron

22/01/2024

En tant qu'exercice du corps, l'écriture n'est pas seulement de l'ordre du symbolique, ni seulement de l'ordre du réel :elle est à la frontière des deux, c'est pourquoi elle les relie ; c'est une technique transformationnelle, c'est un art du devenir autre, qui permet de parvenir au seuil de l'altérité : à l'extrême limite du pensable, de l'imaginable (...) En tant que poussée métamorphique constante à mi-chemin entre le somatique et le psychique, la pulsion scripturale est linguistique de part en part, comme dirait Benjamin. Pourtant elle se configure comme une ascèse corporelle dure et durable qui pousse vers un bonheur douloureux, une extase, une petite mort : un orgasme linguistiquement répétable qui "travaille" le sujet de manière in-finie, sans jamais s'accomplir ou se décharger complètement. En termes freudiens, on pourrait dire qu'il s'agit d'une "bonne" répétition sans refoulement,d'une réélaboration dont le but est justement de ne pas avoir de but ou de fin : d'une analyse joyeusement interminable...

Extrait de Violence et métamorphoses. Le pouvoir des mots et de l'écriture de Eleonora de Conciliis.

20/01/2024

En 1647, un lieutenant de la marine suédoise, du nom deNicolas Köping, servait à bord d’un navire de la Compagnienéerlandaise des Indes orientales, dans le golfe du Bengale.Le bateau approcha un jour une île dont les habitantsvivaient nus et arboraient, à en croire le récit de Köping,des queues semblables à celles des chats, et se comportaientégalement comme des félins. Arrivant sur leurs canoés, cesindigènes – évidemment déterminés à faire du commerce –menacèrent d’investir le bateau et durent être intimidés àcoups de canons. Le pilote fit ensuite débarquer un détachementde cinq membres de l’équipage néerlandais afin defouiller l’île à la recherche de vivres. Ils ne revinrent jamais.Une expédition lancée le lendemain matin à leur recherchene découvrit que leurs os, entassés à côté d’un foyer encorechaud, et leur bateau systématiquement dépouillé de sesrivets de fer.L’histoire de Köping fut reprise dans un traité de Linné,publié en 1760 par son élève Christian Emmanuel Hoppius.Les hommes à queues y étaient répertoriés comme uneespèce de singes judicieusement nommée Lucifer, et illustrésdans l'image ci-dessus. Parmiles lecteurs de Hoppius figurait le juge écossais JamesBurnett, aussi érudit qu’excentrique, plus connu sous lenom de Lord Monboddo. Dans le premier de six volumesintitulés "Of the Origin and Progress of Language" publiés entre 1773 et 1792, Monboddose propose de déterminer les continuités et les différencesentre les humains et les autres animaux, et de caractériserla condition de l’humanité dans son état originel, « naturel» ou « be***al ». Très intrigué d’apprendre l’existenced’humains à queues, sa première préoccupation fut, à justetitre, de vérifier la véracité du récit. Une correspondanceavec Linné le convainquit que Köping était un observateurfiable et honnête...

"Une question de queues" dans Machiavel chez les babouins, Tim Ingold ou de la croyance en l'existence d'hommes à queue dans les récits scientifiques entre ethnocentrisme et colonialisme.

18/01/2024

"Je n'ai du marxisme qu'une connaissance imparfaite. Ce que je dis donc n'est pas à prendre au pied de la lettre. Une connaissance passable du marxisme ça vaut aujourd'hui, m'a assuré un collègue, de vingt à vingt-cinq marks-or, et même dans cette somme, les accessoires ne sont pas compris. En dessous vous n'auriez rien de bon, tout au plus un marxisme de qualité inférieure, sans Hegel, ou encore un marxisme amputé de Ricardo, etc. Du reste, mon collègue n'inclut, dans cette somme, que les frais d'achat des livres, des droits universitaires et les heures de travail ; et il ne compte pas le manque à gagner résultant d'ennuis de carrière ou d'une incarcération éventuelle ; et il néglige aussi le fait que le rendement dans les carrières bourgeoises marque une baisse sensible dès qu'on a lu Marx à fond ; ainsi, pour prendre un exemple, vous ne ferez plus jamais un bon historien ou un bon philosophe si vous avez lu Marx de A à Z"

Extrait de Dialogues d'exilés de Bertolt Brecht, dans La Conscience de classe de Edoardo Sanguineti