10/05/2021
Ce soir, je vous parle de mon premier film, tourné à Cergy-Pontoise.
A l'époque, j'avais écrit ça :
C’était comme s’il fallait que je me fasse ma propre expérience ici avant de pouvoir la retranscrire, ou de savoir que je vais partir, qu’il y a urgence, le besoin d’une trace de mon passage ici. Je veux parler des atmosphères que l’on peut traverser, du manque d’unité, de ces divers espaces qui s’agencent mal. Un centre-ville qui est un centre commercial, avec des noms de rues.
Je n’arrivais pas à imaginer que certaines personnes ont grandi là, vivent là et restent là. Moi je tiens car je ne reste pas, voilà ce qu’il me plaît, d’être totalement à distance avec cette ville, voir d’un regard encore amusé ces immenses structures, qui ne se considèrent pas entre elles. Certains vivent là, et ont vue sur la tour bleue, cette fameuse tour où les appartements sont ronds. Certains vivent à Cergy-Village, dans de grandes maisons, près du port. D’autres ont des pontons qui donnent directement sur l’Oise. Certains sont près du bois.
Je la trouve belle cette ville car j’ai pris le temps de l’observer.
Une des premières choses que j’ai faite en arrivant ici c’est d’accueillir une personne de Couchsurfing. Je ne connaissais rien de la ville, je venais d'emménager. Je suis allée le chercher à la gare et il m’a dit : « Bon, fais moi visiter le centre... ». Et j’avais beau lui expliquer qu’ici, il n’y avait rien mis à part un centre commercial, ce n’était pas concevable pour lui. Et la ville s’arrête là, par des parkings, de grandes routes. On cherchait quelque chose à faire, j’avais entendu parler d’un lac, on a cherché sur internet et on est partis explorer Cergy. On a fini par se baigner, lui nu, et moi en sous-vêtements dans l’Oise.
J’ai aimé cet endroit, comme un lieu de vacances, ne pas m’arrêter à une vision d’une banlieue triste et moche.
On me disait souvent que j’étais f***e d’aller habiter là, que « ça craignait ». Bien évidemment, des gens qui n’avaient jamais mis les pieds ici. Mon appartement était ensoleillé, donnait sur un parc. Cette ville ne me déprimait pas. Ce n’est pas le genre de ville où on adore se promener dans les petites rues, faire les magasins, boire un petit thé dans un endroit sympathique, mais il y avait un attrait autre, plus intéressant qui m’étonnait à chaque fois. Comme un nom de rue qui m’a marqué : « Rue des Verseaux de Feu ».
Pour mes premières visites, je séjournais à l’Hôtel Première à Cergy Saint-Christophe avec ma mère. Il y avait de quoi se demander ce qu’on faisait là. Pour aller jusqu’au RER, on marchait le long de la route, sur un petit chemin entre deux côtés d’herbes hautes. Ma mère m’a dit : « Tu ne peux pas habiter là.» . C’était drôle en fait. On a fini par manger un Kebab en terrasse après les visites, ça ne nous arrive jamais, mais ça faisait partie des spécialités d’ici. En juillet, Cergy était désert, j’avais peur que ce soit en permanence comme ça. Mais les étudiants constituent une bonne partie de la population, ce qui est paradoxal car il n’y a pas de vie nocturne. Pas de boîte, un bar sur le parvis.
Voilà comment a commencé l’histoire de mon film : "Le sol est au dessus et en dessous".
Il a été projeté au cinéma la clef en 2015 et à un festival de court-métrage à la Sorbonne en 2017 qui m'a valu de belles discussions et s'il peut continuer de vivre un peu, alors j'en serai heureuse.
La prochaine fois, je te parle d'un projet très récent, promis.
🌼
https://youtu.be/vttP6iNLXuU