Nées fin 2012, sous la forme d’une association à but non lucratif, les Éditions du Pourquoi pas sont le fruit
d’une collaboration de plus en plus fructueuse entre l’École Supérieure d’Art de Lorraine - site d’Épinal
et de la Ligue de l’Enseignement des Vosges.
Un constat partagé
Depuis plusieurs années, des projets de création se développent alliant le pouvoir créatif de la jeunesse en
formation, le savoir-faire des enseignants de l’École d’Art et le dynamisme associatif généré par la Fédération d’Éducation Populaire. La Ligue a déjà sorti en finalisation d’ateliers, des productions assez remarquables,
productions distribuées aux seuls participants. À l’ESAL, des étudiants créent au cours de leur cursus de formation, une première œuvre qui mériterait une première vitrine. Il est à noter, d’ailleurs, que de nombreux étudiants sortant de l’école sont repérés par des maisons d’éditions et édités par celles-ci. Le projet Ligue-ESAL de production d’outils autour du manifeste de la Ligue « faire société » a vu la création,
entre autres productions remarquables, d’une collection de petits albums jeunesse inspirés des thèmes
du manifeste, créations qui ne demandaient qu’à être partagées.
Le projet : créer une petite maison d’édition indépendante
L’association les Éditions du Pourquoi pas a vu le jour le 16 novembre 2012. Elle est animée pour son démarrage,
par des forces vives de l’ESAL et de la Ligue, personnes qui se sont engagées à titre personnel, chacun apportant
ses compétences au service de l’œuvre collective. Il s’agit bien de faire vivre (certes modestement en rapport avec les moyens humains et financiers) une vraie maison d’édition, indépendante, sans but lucratif, avec un projet politique fort et une réelle ambition artistique. Tout cela pour servir en priorité la jeunesse (les lecteurs mais aussi les créateurs en devenir). Les artistes sélectionnés ne seront pas les seuls étudiants et la diffusion, dans un premier temps, se fera au travers de la vente en ligne.
Les objectifs de l’association et la politique éditoriale
L'association des Éditions du Pourquoi pas a pour but de favoriser et développer :
- une action, sans but lucratif, d’édition d’œuvres, prioritairement pour la jeunesse.
- les projets de création, de recherche et les écritures singulières prioritairement dans le champ de la narration
et de l’image
- au travers de ses éditions, l’éducation au sens et au sensible, le dialogue avec la création contemporaine,
la rencontre et le débat autour de sujets sociétaux
- le partage de la création de jeunes artistes
- pour le plus grand nombre, l’ouverture culturelle, la rencontre et les partenariats avec le milieu de la création artistique sous des formes les plus diverses (conférences, expositions…)
- chez les adhérents l’esprit critique, la solidarité et la volonté de prise en charge des activités communes
Et pourquoi pas ?
Les hommes animés par une curiosité insatiable ont toujours existé. Il est toujours périlleux de s’égarer, de partir sans la garantie d’un retour…
On trouve mille raisons pour rester chez soi, bien peu nous poussent vers l’aventure. Le courage joue donc ici un rôle essentiel, mais il ne suffit pas. Tenter l’inconnu, c’est aussi se remettre en question. Cette décision a le poids d’un engagement, d’une conversion totale. Elle semble d’autant plus hasardeuse
qu’on ignore ce qui nous attend. Seule certitude : aucun retour en arrière ne sera possible. « Souvent l’inespéré répond à qui le tente » disait Shakespeare… Souvent, oui, mais pas toujours. Une telle rupture dans son existence suppose d’abord une grande lucidité. Puis un idéal de liberté. Lui seul peut en découdre avec les frontières
du possible. L’aventurier, l’explorateur, le découvreur, semblent bien seuls. S’ils échouent, on les oubliera. Ils prennent néanmoins tous les risques parce qu’ils savent, au plus profond de leur cœur, que l’on marche derrière eux. Leur solitude est donc paradoxale. Elle est portée par le regard des autres comme un artiste sur la scène. Youri Gagarine, par exemple, ressemble à un ermite tant qu’il est dans l’espace à bord du Vostok. Il est désespérément seul sous les yeux éberlués des savants du monde entier. Il faut toujours deux ingrédients essentiels pour réussir une aventure scientifique. Des êtres d’exception associés
à une machine d’exception. Machine est entendue ici au sens grec de makhana : « l’engin, l’invention ». Des hommes l’ont conçue, c’est une première victoire, mais il en faudra d’autres pour la pousser dans ses derniers retranchements. A la suite de ses illustres modèles, la Santa Maria de Colomb, la Boudeuse de Bougainville, L’Endeavour de Cook, ou le Beagle de Darwin, le docteur Charcot acquit, en 1893, le Pourquoi pas ? Peu de temps après, il fit route vers le Grand Nord. Autrement dit vers l’impossible, vers les icebergs dérivants des naufrages,
vers les barrières infranchissables. « Je trouverai mon chemin, disait Sénèque, ou j’en ferai un. »
Dresser la carte des mers australes, aller où personne ne va jamais, découvrir de nouvelles terres, telle fut la mission que Charcot s’assigna. Non pour la gloire, l’argent, ou la patrie, mais aux seules fins d’enrichir la connaissance
de ces milieux hostiles. Le Pourquoi pas ? fut un navire d’exception, croisant aux confins du monde connu, avec un équipage d’hommes
de science. Une embarcation de savants, de découvreurs et d’aventuriers qui n’ignoraient rien des risques
qu’ils prenaient. Son nom sonne à la fois comme une question mais aussi et surtout comme un défi…
En repoussant, à chaque voyage, les frontières de la connaissance, Charcot rendit possible les expéditions polaires françaises. Il transmit aussi sa passion à d’autres hommes hors du commun, tel Paul Emile Victor. C’est à bord
du Pourquoi pas ? du reste, que ce dernier entreprit l’exploration d’une partie du Groenland. Une fois encore,
cet étonnant navire sut transformer un rêve en une réalité tangible. Laquelle dépassa ensuite, et de beaucoup,
le rêve lui-même. Le docteur Charcot disparut en mer le 16 septembre 1936, sous la violence d’un cyclone,
près des côtes islandaises. L’unique survivant de cette tragédie, sauvé par des paysans islandais, raconta comment Charcot avait pris soin, juste avant sa mort, de libérer de sa cage la mouette Rita, mascotte de l’équipage…
En s’inspirant de ce nom prestigieux, les Éditions du Pourquoi pas entendent, elles aussi, voguer loin des mondes connus et des sentiers battus. Naviguer vers l’ailleurs, susciter d’autres regards, jouer avec des horizons sans cesse différés. Issues d’une rencontre entre la Ligue de l’Enseignement et l’Ecole supérieure d’art de Lorraine,
entre un idéal de partage, tous azimuts, de la culture livresque et une création permanente, les Éditions du Pourquoi pas s’adressent à tous ceux que le chant des sirènes inspire. Bien entendu, si les enfants sont naturellement plus curieux que les adultes, elles leur parleront en premier lieu. Mais ceux qui ont gardé à l’esprit cette capacité de réagir devant l’inconnu, ce goût de l’étrange et de l’ailleurs,
s’y retrouveront nécessairement. À ces derniers, les Éditions du Pourquoi pas rappellent qu’on n’est pas vieux tant que l’on cherche. Qu’ils songent à Charcot, lorsqu’il libère sa mouette avant de disparaître, au cours de sa 70e année, dans les gouffres profonds…
Il n’y a pas d’âge pour entreprendre, ni pour s’émouvoir.