01/01/2024
PREMIER JANVIER 1804: PROCLAMATION DU PREMIER ÉTAT NÈGRE DU MONDE!
Dimanche premier janvier 1804, au milieu d'une joie frénétique, sous l'auspice de Jean Jacques DESSALINES, une foule immense gagnait la place d'Armes des Gonaïves pour consacrer le premier État n***e du monde. La consécration de la victoire de Vertières était due à la conjugaison des forces physiques et spirituelles des centaines de milliers d'hommes réduits en esclavage pendant trois siècles. Dans cette manifestation grandiose, trois actes rédigés par Boisrond Tonnerre ont été lus:
- le premier acte relatif à une proclamation au peuple haïtien, lu par Jean Jacques Dessalines, général en chef. Dans cet acte, ce dernier faisait comprendre au peuple que tout n'était pas encore acquis à la cause haïtienne malgré la défaite de la France. Il y avait encore des Français dans le pays et les Haïtiens se croyaient libres et indépendants. Si les Français trouvaient asiles parmi eux, ils seraient les machinateurs de leurs troubles et de leurs divisions. Ils juraient donc à l'univers entier, à la postérité, à eux-mêmes, de renoncer à jamais à la France et de mourir plutôt que de vivre sous sa domination; de combattre jusqu'au dernier soupir pour l'indépendance de leur pays.
- le deuxième acte nommait Dessalines gouverneur général à vie avec le droit de désigner son successeur. Les généraux promettaient d'obéir aveuglement aux lois émanées de l'autorité du gouverneur général.
- le dernier était l'acte de l'indépendance (batistè peyi a) du pays signé par 36 militaires et 1 civil (Boisrond Tonnerre).
L'indépendance proclamée le premier janvier 1804 était fragile et précaire dans son contexte externe et interne.
Primo, les grandes puissances n'ont pas reconnu cette indépendance. Pour elles, l'exemple haïtien est contagieux et qu'il fallait empêcher les rebelles de Saint-Domingue d'exporter leur révolution. À cet effet, Haïti est mise en isolement. Le Congrès de Panama du 22 juin 1826 témoigne cet isolement. Notre pays y était invité. Mais, sous la menace américaine, le nom d’Haïti a dû être rayé de la liste des pays invités. Malgré tout, Haïti a fait de son mieux pour exporter sa révolution: des stratégies militaires, des armes et munitions, des soldats, de l'argent, des provisions de bouche ont été donnés aux indépendantistes de l'Amérique latine, Francisco de Miranda en 1806 et Simon Bolivar en 1816 en vue de libérer cette partie du continent de la domination espagnole.
À la faveur de l'épopée haïtienne, les représentants de vingt-neuf (29) pays africains et asiatiques allaient condamner la colonisation, l'impérialisme en général, et l'apartheid en particulier à la conférence de Bandung du 18 au 24 avril 1955. Ils ont aussi posé à cette conférence le principe de l'autodétermination des peuples.
Secundo, une lutte acharnée pour la possession des terres s'est déclarée entre les deux ailes de l'aristocratie noire et mulâtre.
Face à cette situation, et pour la sauvegarde des acquis de la révolution, le père de la patrie a dû prendre toute une série de mesures drastiques d'ordre géopolitique et géostratégique. Parmi lesquelles:
1.- le massacre des Français: l'élimination physique des Français a été ordonnée à l'exception de tous ceux qui pouvaient contribuer au développement du pays. C’était une exigence du moment;
2.- la militarisation du pays: Dessalines a organisé une armée de 52 500 hommes pour protéger le territoire contre un éventuel retour des Français;
3.- la fortification du pays: des Forts ont été construits, par exemple: le Fort Décidé, le Fort Innocent, le Fort Timadanm ( ou Fort Madame), le Fort Culbuté, le Fort Doko, le Fort Fin du monde à Marchand-Dessalines; la citadelle de la Ferrière à Cap-Haïtien; Fort Dauphin à Fort-Liberté; Fort Jacques et Fort Alexandre à Fermath; Fort Dimanche à Port-au-Prince; Fort Marfranc à Jérémie; Fort Campan à Léogane; Fort Delpêche à Archaïe; Fort Bayannais à Hennery; Fort sans Quartier à Marmelade; Fort Brave à Marmelade; Fort Jalouisière à Marmelade; Fort Dahomey à Camp Coq; Fort rivière à Grande rivière du nord; Fort neuf à Grande rivière du nord; Fort trois Pavillons à Port-de-Paix; Fort Desbois à Anse à veau; Fort Garit à Petit Goâve; Fort Bonet Caré à Saint-Louis du sud; Forteresse des Platons aux Cayes; Fort Ogé à Jacmel;
4.- la campagne de l'est: Dessalines voulait avoir la mer pour frontière;
5.- la nationalisation des biens laissés par les colons, la vérification des titres de propriété, le caporalisme agraire, etc.
La révolution qui a accédé Haïti à l'indépendance est la plus grande de toutes révolutions qui ont jalonné l'histoire des peuples. Elle est totalement différente des autres:
- La révolution américaine (22 mars 1765 - 3 septembre 1783) était seulement anticolonialiste. Elle était l'œuvre des colons britanniques contre la couronne de la Grande Bretagne. L'esclavage persiste aux États-Unis après la révolution. Il a fallu attendre le 6 décembre 1865 pour que l'esclavage soit aboli par le Congrès;
- La Révolution française (5 mai 1789 - 9 novembre 1799) était seulement politique. Elle était l'œuvre de la bourgeoisie qui voulait se débarrasser de la monarchie absolue. Le cens électoral tel qu'il est défini dans la constitution de 1791, mettait les paysans à l'écart de la vie politique;
- La révolution de l'Amérique latine était purement et simplement anticolonialiste réalisée par des blancs créoles.
Cependant, la révolution haïtienne (21 août 1791 - 1 janvier 1804) était l'œuvre d'anciens esclaves (n***es). C'était une révolution antiesclavagiste, anticolonialiste et antiségrégationniste. Donc, elle était la plus complète des révolutions.
Plus de deux siècles après l'indépendance, qu'avons-nous fait de cette date et de ce pays? Jadis, de grandes festivités étaient organisées pour marquer ce jour extraordinaire (1er janvier). Les familles se réunissaient pour manger ensemble la soupe de l’indépendance communément appelée soupe joumou ou soupe au giraumont. Maintenant, des politiciens accaparent ce jour pour manifester leur réprobation dans les rues, (vle pa vle fòl ale) souvent violemment. Ils souillent la mémoire de ceux qui ont versé leur sang pour nous léguer cet héritage.
Rien de ce qui puisse rappeler l'exploit de nos héros n'est organisé ces jours-ci. Au contraire, le pays connait une descente aux enfers.
Sur le plan diplomatique, c'est le chaos. Beaucoup de nos agents diplomatiques ne sont pas compétents. Ils ne peuvent pas représenter valablement Haïti au pays d’accueil. Quelques-uns qui possèdent la compétence du métier sont soit des mercenaires, soit impuissants pour remplir leur mission diplomatique;
Sur le plan judiciaire, c'est une justice au plus offrant et dernier enchérisseur. Certains hommes d’État parlent de juge de l’équipe!
Le taux d’inflation, l’insécurité, le chômage grandissant, l’immigration forcée en masse, le gangstérisme, … expliquent la situation économique chronique du pays.
Sur le plan éducatif, c'est le désastre généralisé. On ne sait pas qui former et pour quelle société.
La situation de l’hôpital général peut expliquer la société haïtienne sur le plan sanitaire. La malnutrition chronique nous aide à comprendre l'aspect alimentaire de nos deux siècles d'indépendance.
Sur le plan de l'énergie électrique, nous nous demandons si nous ne sommes pas encore en 1804.
Le tout et bien d'autres en complicité avec la politique politicienne travaillent pour la destruction des acquis de la révolution.
Il nous faut per fas et nefas un autre pays!
Jean Garry Bonheur