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La diaspora algérienne sort de l’ombre : Tebboune renoue les liens, l’Algérie se réinvente avec ses enfants du mondeRédi...
25/05/2025

La diaspora algérienne sort de l’ombre : Tebboune renoue les liens, l’Algérie se réinvente avec ses enfants du monde

Rédigée à la demande du Conseil Mondial de la Diaspora Algérienne (CMDA), cette tribune signée par Lila Lefèvre a été publiée pour la première fois dans le numéro inaugural du magazine DZ MAG, édité et diffusé par le CMDA à l’occasion du gala du 23 mai 2025 à Paris. La rédaction d’Atipik la republie aujourd’hui avec l’accord préalable de la direction du CMDA.

Dispersée, marginalisée, longtemps reléguée à la périphérie du débat national, la diaspora algérienne ouvre aujourd’hui un nouveau chapitre. Sous l’impulsion du président Abdelmadjid Tebboune, un lien inédit, à la fois stratégique et affectif, se tisse entre l’Algérie et ses enfants établis à l’étranger. Une révolution douce mais déterminante, porteuse de profondes mutations pour l’avenir du pays. C’est dans cet élan qu’est né le Conseil Mondial de la Diaspora Algérienne (CMDA), porté par une élite algérienne diverse, rassemblée autour d’un homme de terrain : Karim Zéribi, franco-algérien et ancien député européen. Son credo est clair et rassembleur : « Nous voulons construire des ponts, là où d’autres veulent ériger des murs. »

De l’exil à la renaissance d’un lien

Pendant des décennies, les Algériens établis à l’étranger — en particulier en France, où ils constituent la plus importante communauté issue de l’immigration maghrébine — ont vécu dans un entre-deux inconfortable : perçus comme des étrangers dans leur pays d’origine et comme des immigrés dans leur pays d’accueil. Dispersée, parfois déconsidérée par les institutions algériennes, la diaspora semblait tenue à l’écart de la vie nationale. Un isolement aggravé par les lenteurs administratives, les lourdeurs consulaires et l’absence d’une réelle politique d’inclusion.

Mais en 2024, un tournant s’opère. Pour son second et dernier mandat, le président Abdelmadjid Tebboune place la diaspora au cœur de son projet de gouvernance. Il ne s’agit plus simplement de discours ou de symboles : des mesures concrètes, inédites et hautement symboliques sont mises en œuvre.

Des gestes forts, une volonté assumée

Dès les premiers mois de l’année, les signes de cette réorientation sont visibles. L’annonce du transfert gratuit en Algérie des dépouilles des Algériens décédés à l’étranger crée un électrochoc positif dans la communauté. Pour beaucoup, c’est une reconnaissance posthume, mais surtout politique. L’État affirme ainsi que les Algériens de la diaspora sont pleinement membres de la nation, où qu’ils vivent, quelle que soit leur nationalité secondaire.

Dans la foulée, le gouvernement nomme un ministre délégué chargé de la diaspora. Ce dernier entame une tournée mondiale, de Paris à Montréal, de Bruxelles à Dubaï, à la rencontre des communautés algériennes. Objectif : écouter, comprendre, rassurer et surtout, bâtir un pont durable entre ces citoyens dispersés et leur pays d’origine.

L’accès au territoire national est également facilité. Les binationaux peuvent désormais entrer en Algérie sans visa, en présentant leur carte d’identité algérienne même expirée. Ce geste, hautement symbolique, efface une barrière psychologique majeure. L’Algérie ouvre grand ses portes à ses enfants du monde.

Été 2024 : le retour des millions

L’effet ne se fait pas attendre. L’été 2024 marque un afflux sans précédent : plusieurs millions d’Algériens vivant à l’étranger rentrent au pays pour les vacances. Les aéroports, les ports et les routes témoignent d’un engouement inédit. Mais au-delà du tourisme affectif, c’est un retour porteur d’opportunités.

 

Beaucoup de ces visiteurs viennent avec des projets. Entrepreneurs, universitaires, médecins, journalistes, ingénieurs… la diaspora algérienne a considérablement évolué. Loin des clichés d’une immigration ouvrière ou isolée, elle s’est enrichie, structurée, professionnalisée. Elle détient aujourd’hui un capital humain impressionnant, souvent formé dans les meilleures institutions mondiales.

Certains commencent à investir : création de start-ups, lancement de marques, ouverture de cliniques ou de centres de formation. D’autres entament les démarches pour un retour définitif. Pour la première fois, le rêve de contribuer au développement du pays devient accessible, soutenu par la volonté politique du sommet de l’État.

Investir, s’implanter, transformer

Conscient du potentiel de cette force vive, le gouvernement algérien multiplie les initiatives pour faciliter l’investissement des diasporiques : simplification des procédures, exonérations fiscales temporaires, assistance juridique, guichets uniques. Le message est clair : l’Algérie a besoin de ses enfants, et elle leur tend la main.

De son côté, le CMDA, très opérationnel, se renforce à travers les principales capitales du monde pour guider et informer la diaspora.

Des conventions sont en cours de signature avec des associations de professionnels algériens établis à l’étranger. L’idée : créer des ponts de savoir-faire, organiser des transferts de technologie, faire du lobbying économique à l’international et contribuer à moderniser l’économie nationale.

Les premières retombées sont déjà visibles : l’intérêt de jeunes entrepreneurs franco-algériens pour les secteurs du numérique, de l’agroalimentaire ou de l’écotourisme, ou encore le lancement d’initiatives de recherche collaborative entre universités algériennes et établissements européens.

CMDA : le bras stratégique de la diaspora

Le Conseil Mondial de la Diaspora Algérienne ne se limite pas à jouer un rôle d’accompagnement économique. Il se structure aujourd’hui comme un acteur central d’influence, dans une logique de soft power assumé.

Présent à Paris, Dubaï, Montréal, et très prochainement à Londres, Berlin, ainsi qu’à Bruxelles et Washington, le CMDA entend combler un vide stratégique : l’absence quasi-totale de représentation algérienne dans les sphères économiques et politiques internationales, là où se joue une partie de l’avenir des nations.

À travers des relais locaux, des partenariats institutionnels, et une présence croissante dans les forums mondiaux, le CMDA entend positionner la diaspora comme un levier d’influence géopolitique et économique. Une diplomatie parallèle, complémentaire, mais essentielle. Car sans voix dans les capitales du pouvoir, aucune stratégie nationale ne peut être complète.

Cette approche pragmatique, articulée autour de l’écoute des besoins de terrain et d’une vision à long terme, pourrait bien faire du CMDA l’un des piliers de la nouvelle stratégie algérienne à l’international.

Une diaspora qui s’éveille politiquement

Mais le réveil de la diaspora est aussi politique. En Europe, notamment en France et en Belgique, les Algériens prennent conscience de leur poids. Des figures émergent, des collectifs se forment, et l’idée d’un lobbying organisé fait son chemin. L’objectif n’est pas seulement de défendre leurs droits dans les pays d’accueil, mais aussi de peser dans les relations bilatérales, de promouvoir une image moderne et positive de l’Algérie, et de jouer un rôle actif dans le développement du pays d’origine.

Cette dynamique est encore en construction, mais elle est porteuse d’un immense potentiel. Elle pourrait, à terme, repositionner l’Algérie dans le jeu mondial grâce à sa diaspora comme levier d’influence et de croissance.

Un avenir à consolider

Certes, tout n’est pas parfait. Les problèmes bureaucratiques subsistent, les lenteurs administratives freinent certains élans, et la méfiance d’une partie de la diaspora reste présente. Mais pour la première fois depuis longtemps, l’Algérie donne des signes tangibles de volonté d’inclusion. Et cela change tout.

Ce début d’ère Tebboune II pourrait marquer un moment charnière : celui où l’Algérie décide de faire de ses enfants de l’étranger non plus des exilés, mais des acteurs à part entière de sa transformation. Si cette dynamique se poursuit, si elle est accompagnée de réformes en profondeur et de continuité politique, alors le pari d’un partenariat gagnant-gagnant entre l’Algérie et sa diaspora sera tenu.

Le rendez-vous est donné dans deux ou trois ans pour un premier bilan. Mais une chose est sûre : la diaspora algérienne s’éveille, elle se structure, et elle commence à peser. En silence, elle pourrait bien devenir l’un des moteurs de l’Algérie de demain.

Rédigée à la demande du Conseil Mondial de la Diaspora Algérienne (CMDA), cette tribune signée...

Diaspora algérienne : un gala historique marque une nouvelle ère pour le CMDA (Vidéo)Forte de près de 8 millions de memb...
25/05/2025

Diaspora algérienne : un gala historique marque une nouvelle ère pour le CMDA (Vidéo)

Forte de près de 8 millions de membres à travers le monde, dont près de 5 millions en France, la diaspora algérienne amorce un tournant historique. Structurée autour du Conseil Mondial de la Diaspora Algérienne (CMDA), cette communauté ambitionne désormais de jouer pleinement son rôle sur la scène internationale, à l’instar des grandes diasporas organisées.

Le 23 mai 2025 a marqué un jalon important dans cette dynamique, avec l’organisation d’un gala prestigieux à Paris, orchestré par le CMDA. L'événement, chapeauté par l’ancien député européen, Karim Zéribi et son équipe, a réuni plus de 750 invités issus des mondes du sport, de la culture, des médias, de l’économie et des sciences. Les places ont été prises d’assaut dès l’ouverture des inscriptions, preuve de l’intérêt croissant pour cette initiative.

Aux côtés de Farida Ghezali, présidente du CMDA, Karim Zeribi a animé un conseil d’administration exceptionnel, qui a décerné des trophées d’honneur à des figures emblématiques de la diaspora. Parmi les lauréats distingués :

Yasmina Khadra, écrivain algérien le plus traduit dans le monde

Chico Bouchikhi, membre fondateur du groupe Gipsy Kings

DJ Snake, artiste franco-algérien mondialement reconnu

Lila Lefèvre, directrice générale de la chaîne ATIPIK TV et présentatrice de « Le Vrai Dialogue », l’émission la plus regardée dans le monde francophone.

Maya Zerrouki, journaliste, présentatrice de Diasporama sur la plateforme du Soir d’Algérie.

Mohand Sidisaïd, vice-président de Pfizer

Yasmine Belkaid, directrice générale de l’Institut Pasteur

Kaylia Nemour, championne olympique de gymnastique

⁠Ahmed Laouedj, sénateur franco-algérien

⁠Amine Diffalah, chef d’entreprise algéro-canadien

Zineb Ghout, directrice générale de Peugeot Europe

Michel Bisac, président de la CCIAF et ami de l’Algérie

⁠Le groupe IFRI en qualité d’entreprise à l’international

⁠Le groupe DPS MARKET, entreprise de la diaspora en Europe

La cérémonie, présentée par Ahmed Lahri, ancien présentateur du journal télévisé de Canal Algérie, a été ponctuée de moments d’émotion et de fierté. Le trophée d’or, dont le design rappelle subtilement le Makam El Chahid, symbole du sacrifice et de la mémoire nationale, témoigne du soin apporté à chaque détail par Karim Zeribi, très attaché à ses racines.

Une jeunesse en quête d’identité et d’engagement

Un fait marquant de la soirée fut la présence croissante de jeunes issus de familles mixtes, souvent nés en Europe, mais désireux de renouer avec leurs origines. À l’image de Wacim-Martin, venu de Bruxelles dont la mère est algérienne et le père belge, ou de Karim-Massy, dont la mère est italienne et le père algérien, cette nouvelle génération commence à s’impliquer activement dans le CMDA, découvrant le rôle qu’elle peut y jouer.

La soirée a également été l’occasion de constater la forte représentation féminine et la montée en puissance d’une élite diasporique, brillante et engagée.

Un dîner symbolique, un message profond

Le gala s’est clôturé par un dîner aux saveurs marines, apprécié de tous, bien que l’essentiel ne résidait pas dans l’assiette. Ce dîner était avant tout un prétexte à la rencontre, au dialogue, à la réflexion commune sur l’avenir de l’Algérie et le rôle que peut jouer sa diaspora dans son développement.

En écho à l’appel du Président Abdelmadjid Tebboune, qui affirme ne faire « aucune distinction entre les enfants de l’Algérie, de l’intérieur ou de la diaspora », les participants ont réaffirmé leur volonté de s’unir, d’agir et de contribuer au rayonnement du pays. Le chef de l’État avait d’ailleurs déclaré : « Je ne permettrai pas qu’on touche à un seul cheveu de notre diaspora, où qu’elle réside. »

L’été 2024, prémices d’un retour aux sources

L’année précédente avait déjà témoigné d’un engouement inédit pour l’Algérie. L'été 2024 a vu les membres de la diaspora affluer vers leur pays d’origine, animés par le désir d’investir, de créer, de découvrir ou redécouvrir leur héritage. Hôtels, restaurants, musées et sites touristiques ont fait le plein, au grand bonheur des opérateurs locaux.

Vers un lobby algérien fort et structuré

Le 23 mai 2025 restera dans les annales comme le jour où la diaspora algérienne a franchi une étape décisive, en s’organisant autour d’une vision commune. À l’instar d’autres communautés internationales, le CMDA ambitionne de faire émerger un lobby algérien influent, uni et structuré, capable de défendre les intérêts de ses membres tout en contribuant activement au développement de l’Algérie.

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Forte de près de 8 millions de membres à travers le monde, dont près de...

Béryl, le silence de l'État françaisPar Louis Bulidon, ancien appelé du contingent et ingénieur chimiste, témoin des ess...
22/05/2025

Béryl, le silence de l'État français

Par Louis Bulidon, ancien appelé du contingent et ingénieur chimiste, témoin des essais nucléaires français en Algérie

"Béryl sous le boisseau", c’est ainsi que je résume l’omerta persistante autour de cet essai nucléaire français raté, conduit dans le Grand Sud algérien. Un silence assourdissant, orchestré par la puissance publique, qui perdure encore aujourd’hui.

En 2011, j’ai publié Les Irradiés de Béryl. Cette parution m’a valu une invitation dans La Marche des sciences sur France Culture, puis dans La Marche de l’histoire sur France Inter. Mon camarade de l’époque, le physicien nucléaire Raymond Sené – avec qui j’ai partagé le quotidien du site d'Im Amguel – y était également présent. Ce que nous avons livré alors comme témoignage fut reçu, au mieux, dans l’indifférence, au pire, dans l’ignorance la plus crasse de la part des autorités concernées.

Quelques années plus t**d, un personnage se présente à nous, prétendant avoir mené une mission technique sur le site d’In Ekker, avec du matériel dernier cri, sans y avoir relevé la moindre trace de radioactivité. Cela, quatre ans seulement après l’essai de Béryl. Très vite, il s’est trahi : il ignorait jusqu’au nom de notre base vie, le camp Saint-Laurent, où nous avions séjourné durant six mois.

Ce même individu n’a cessé, par la suite, de me harceler avec ses thèses négationnistes. Dernier épisode en date : juste avant l’émission de Lila Lefèvre du 19 février, il me provoque à nouveau sur un ton cynique, en liant la question de Béryl aux revendications algériennes : "L’Algérie va encore réclamer de l’argent à la France", disait-il. Il affirmait avoir récemment arpenté le Hoggar, compteur Geiger à la main, sans mesurer plus de radioactivité que sur son balcon en métropole.

La réaction de Raymond Sené fut immédiate : un sourire ironique, accompagné d’un rappel utile – il y a un bouton marche/arrêt sur un compteur Geiger.

Voilà donc comment la France, mon pays, a traité notre témoignage. Voilà comment les victimes de Béryl, nos camarades appelés du contingent, sacrifiés au pied du Tan Afella le 1er mai 1962, ont été oubliées.

Je veux ici rappeler l’émotion profonde que suscitent, chez nous vétérans, les récits poignants des malades irradiés. Leur sort, longtemps passé sous silence, est une blessure encore vive.

Enfin, comment ne pas évoquer la défaillance de l’historien Benjamin Stora, pourtant mandaté officiellement pour faire la lumière sur la mémoire coloniale ? Dans son rapport remis au président de la République en janvier 2021, aucune mention sérieuse de Béryl, ni des conséquences des essais nucléaires français dans le Hoggar. Complicité ou aveuglement ? Dans tous les cas, un échec coupable.

Il est grand temps que ce silence soit brisé.

Par Louis Bulidon, ancien appelé du contingent et ingénieur chimiste, témoin des essais nucléaires français...

Debout malgré tout : face à Peter Mertens, le combat d’un homme, le cri d’un peuple (Interview exclusive)Propos recueill...
21/05/2025

Debout malgré tout : face à Peter Mertens, le combat d’un homme, le cri d’un peuple (Interview exclusive)

Propos recueillis par Lila LEFEVRE.

Peter Mertens, c’est 1,94 m d’endurance et de convictions. Une stature, une voix, une trajectoire forgée dans l’opiniâtreté. Secrétaire général du PTB et député fédéral, il fait partie de ces hommes qui ne lâchent jamais le rêve. Depuis 2008, il a sorti son parti du néant, redonné un souffle à la gauche radicale. À Bruxelles, le PTB est passé de 0,5 % à 18 %. Une ascension presque insensée, orchestrée dans l’ombre mais avec méthode.

Il m’a reçu au 171, Boulevard Lemonnier, dans un siège réinventé à son image : rénové, lumineux, ouvert sur le monde. Ensemble, nous avons abordé deux urgences majeures : la tragédie humaine à Gaza et la course au réarmement de l’Europe.

Cette interview, c’est aussi une renaissance pour moi. La première depuis deux mois. J’ai failli tout arrêter, brutalement, suite à un malaise vagal qui m’a laissé deux vertèbres fracturées. La douleur, le silence, la peur. J’ai mis du temps à remonter. Mais aujourd’hui, je suis là. Fragile encore, corset au dos, mais debout. Et plus que jamais, j’ai ressenti l’urgence de faire entendre des voix comme celle de Peter.

ATIPIK TV : Monsieur Mertens, on observe, un peu partout en Europe, un regain d’intérêt pour la situation à Gaza. Pourquoi ce changement de discours et de paradigme ces dernières semaines ?

Peter Martens : Je pense que plusieurs facteurs expliquent ce changement. D’abord, la question Trump a, d’une certaine manière, réveillé l’Europe. On en reparlera plus t**d. Ensuite, les mouvements de solidarité avec la Palestine ne cessent de grandir. Par exemple, ici en Belgique, ils ont été plus importants qu’ailleurs, en France aussi, mais surtout, aux Pays-Bas, où le gouvernement a tenté pendant 18 mois de réprimer et de faire taire ces manifestations. Pourtant, ce dimanche, il y a eu un immense rassemblement à La Haye, avec plus de 100 000 personnes. À Londres également, on a vu 500 000 personnes dans la rue.

Deuxièmement, le paradigme a changé depuis Washington. Trump a insulté l’Europe en affirmant qu’il ne la protégerait plus. Pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, l’Europe commence à remettre en question toute cette relation transatlantique, même si elle ne va pas encore jusqu’à agir concrètement. Le débat est néanmoins lancé.

Jusqu’ici, toute cette guerre d’annexion et de colonisation menée par Israël a été activement soutenue par les États-Unis et, dans une moindre mesure, par l’Europe. Ce qui change aujourd’hui, c’est la position américaine vis-à-vis de l’Europe.

Troisièmement, sur le terrain, nous assistons à la phase finale de l’horreur, ce qui s’apparente à un génocide. Le gouvernement d’extrême droite israélienne est très clair : il veut pousser tous les habitants de Gaza hors de leur territoire, c’est un nettoyage ethnique pur et simple, ils veulent s’approprier Gaza pour Israël. Je crois que ces trois éléments expliquent ce changement dans le discours de certains politiciens, même si cela ne se traduit pas encore en actes concrets.

Aujourd’hui, par exemple, il y a le débat sur l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël qui est en cours de renégociation. On parle de ce génocide qui dure depuis 10 mois. Et tous les spécialistes de l’histoire du génocide s’accordent sur le fait qu’Israël remplit tous les critères nécessaires pour qualifier la situation de génocide. Il y a environ 10 ou 11 critères à prendre en compte, et Israël répond à tous.

Pourtant, dans cet accord commercial entre l’Union européenne et Israël, on ne considère pas Israël comme un acteur normal, mais comme un partenaire commercial privilégié de l’Union. Ce terme est important : Israël est un partenaire commercial préféré.

Cela signifie qu’il n’y a pas de taxes à l’exportation avec Israël, alors même qu’un génocide est en cours. C’est complètement insensé.

Pour le moment, rien n’a changé, ni au niveau des gouvernements européens, ni en termes de sanctions. Peut-être que cela va venir, mais pour l’instant, rien.

ATIPIK TV : Pensez -vous que tout cela a été réfléchi, planifié depuis longtemps ou alors, et pourquoi l’Europe a attendu si longtemps avant de réagir ? Il y a eu tant de morts, et c’est seulement avec l’arrivée de Trump au pouvoir que la position a commencé à changer. Jusqu’où Européens, Américains et Israéliens iront-ils ?

Peter Martens : Historiquement, depuis la Seconde Guerre mondiale et même avant, après la Première Guerre mondiale, des plans ont été proposés pour créer un État dans la palestinienne historique. Mais dès le départ, Israël est un produit de l’imaginaire colonial européen.

Israël a été créé en tant qu’« État colonial de peuplement » — un État fondé sur le colonialisme, basé sur l’expulsion des peuples indigènes de leur terre.

Donc, dans le projet sioniste israélien, il y a le vol des terres palestiniennes, il y a un système d’apartheid, une discrimination structurelle profondément ancrée. Mais c’est en réalité un projet européen, soutenu dès le départ par les Américains, car pour eux, Israël représente le pont de l’impérialisme occidental dans le monde arabe.

Ce n’est donc pas un hasard si Israël participe à l’Eurovision, ce célèbre festival de musique, ou au niveau du football européen. Pour les colonisateurs européens dès le début, Israël est un projet européen. L’Israël d’apartheid est, dès l’origine, un projet qui s’inscrit dans l’impérialisme européen et américain.

ATIPIK TV : Vous avez évoqué l’Eurovision, Parlons-en brièvement. Lors de la demi-finale retransmise en direct, la jeune chanteuse israélienne a été sifflée par les spectateurs. On a entendu des cris « Free Palestine », « Libérez la Palestine », « Arrêtez le génocide ». Mais quelque chose d’extraordinaire s’est produit : malgré la diffusion en direct, les organisateurs, c’est-à-dire l’Union européenne de l’Eurovision, ont minimisé au maximum ces cris. Les téléspectateurs à domicile, dans presque tous les pays membres de l’Eurovision, ne les ont pas entendus. Comment expliquez-vous cela ? L’Eurovision est-elle vraiment un événement artistique et apolitique ? Ou montre-t-elle plutôt ses limites en révélant une politisation implicite ?

Peter Mertens : Je dirais que c’est absolument le cas. Moi, je suis partisan de sanctionner l’Eurovision. Je trouve scandaleux qu’en pleine période de génocide, l’Eurovision adopte une telle attitude. Cela fait déjà deux ans que cela se produit. L’année dernière, ils ont fait exactement la même chose, étouffant la protestation.

Ils ont aussi exclu Joost Klein, le chanteur néerlandais, pour des raisons non prouvées. Tout le monde soupçonne que cette exclusion est liée à son soutien aux Palestiniens. Pourtant, un État qui commet un génocide n’est jamais exclu. C’est insensé.

Ils ont même falsifié les votes. Israël a dépensé plus de 170 millions d’euros en campagne de propagande pendant l’Eurovision, diffusée partout en Europe. Chacun pouvait voter plusieurs fois par téléphone, moyennant finance, favorisant Israël, notamment dans des pays où la critique était forte, comme l’Espagne et la Belgique.

ATIPIK TV : Le Premier ministre espagnol a demandé l’exclusion d’Israël de l’Eurovision. Pourquoi la Belgique ne l’a-t-elle pas suivi ?

Effectivement, pourquoi la Belgique n’a pas suivi ? Récemment, en Belgique, le syndicat des services publiques, l’ACOD, a lancé une action pour afficher un message pro-palestinien juste avant l’Eurovision. Une discussion s’ouvre désormais pour que la Belgique cesse de participer à l’Eurovision en tant que pays.

Je trouve que c’est justifié, car soutenir un événement culturel qui ne prend aucune position contre un génocide, qui étouffe la protestation et falsifie les votes, c’est inacceptable. Ce scandale est aussi grave que les Jeux olympiques de Berlin en 1936, qui servaient à glorifier un régime. Aujourd’hui, l’Eurovision joue le même rôle en normalisant un État qui commet un génocide.

ATIPIK TV : Un dernier mot sur l’Eurovision : quand Israël a été intégré en 1978, alors même qu’il ne remplissait pas les critères géographiques – il fallait être européen –, pourquoi n’a-t-on pas envisagé d’intégrer aussi les Palestiniens ?

C’est une question géopolitique. Le critère géographique est censé être neutre, mais il est étendu pour inclure Israël, qui n’est pas en Europe. Si ce critère est élargi, alors la Palestine devrait aussi être intégrée. C’est un acte politique, tout comme pour l’UEFA, qui a laissé l’équipe israélienne participer au championnat européen depuis des années.

Tant que ce projet reste un projet d’annexion, de colonisation et d’apartheid, il continuera à créer des tensions dans le monde arabe. Ils peuvent essayer d’acheter certains gouvernements arabes, mais les peuples, eux, n’accepteront jamais un État comme Israël.

ATIPIK TV : Plusieurs pays membres de l’Union européenne ont récemment reconnu l’État palestinien. Qu’attend la Belgique ?

Oui, qu’attend la Belgique ? Il y a deux choses importantes à dire. D’abord, il y a la question du plan Macron. Emmanuel Macron reporte la reconnaissance officielle jusqu’en juin, mais surtout il conditionne cette reconnaissance.

Cela pose problème, car le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est un droit fondamental. Ce n’est pas à Bruxelles ni à Paris de décider ce qu’est ou doit être un État palestinien, c’est aux Palestiniens eux-mêmes.

Toutes ces conditions, comme la reconnaissance préalable d’Israël par d’autres pays arabes, ne sont pas conformes au droit international. En clair, cela signifie qu’ils ne veulent pas vraiment reconnaître l’État palestinien, ils veulent conditionner cette reconnaissance, la repousser indéfiniment. Pour moi, ce plan Macron est problématique, car il remet en cause le droit international et repousse la question essentielle de la reconnaissance.

Mais, en second lieu, la discussion actuelle porte sur la reconnaissance de l’État palestinien. Pourtant, aucun habitant de Gaza ne se préoccupe en ce moment de cette reconnaissance. Tous les Gazaouis veulent simplement survivre. Ils ont besoin de pain, d’eau, de médicaments, d’hôpitaux, etc.

La question d’aujourd’hui n’est pas la reconnaissance de la Palestine, mais bien le génocide et la famine planifiée qui doit cesser. Il y a actuellement 3 000 camions à la frontière remplis de légumes, de fruits, de pain… Et pourtant, ces deux millions de personnes sont en train d’être affamées.

Je trouve cela particulièrement cynique que les grands dirigeants, notamment en Europe, parlent de reconnaître la Palestine sous certaines conditions, alors qu’en même temps, le blocus illégal continue, notamment sur les médicaments.

La Croix-Rouge a été créée il y a deux siècles pour assurer que même en temps de guerre, soigner et nourrir les populations soit un droit fondamental. Pourtant, ce principe n’est absolument pas respecté en Palestine.

Ils affament les gens, et comme si cela ne suffisait pas, six soignants ont été tués, certains avec une b***e dans la nuque, et enterrés avec leur ambulance.

ATIPIK : Laissons un instant la Palestine de côté et parlons un peu de Bruxelles, la capitale de l’Union européenne. Vous avez mentionné E. Macron, le président français, tout à l’heure. Il a choisi Paris récemment pour un sommet visant à réarmer l’Union européenne. Quelle a été la position de la Belgique ? On est pour ou contre ?

Trois points sont clairs : Dès le début de son second mandat, Trump a affirmé qu’il allait se concentrer sur la Chine et l’Indo-Pacifique pour encercler militairement la Chine. Il a estimé que c’était trop coûteux, trop « overstretched », pour l’armée américaine de mener à la fois des guerres en Europe et d’encercler la Chine. C’est donc aux Européens de prendre le relais. C’est clair : d’un point de vue impérialiste américain, les États-Unis s’occupent de la Chine, et c’est aux Européens de s’occuper de l’« encerclement » en Europe.

Deuxième point : l’Union européenne veut créer une armée européenne, mais pas vraiment une armée unifiée. Plutôt une couche supplémentaire de militarisation. Les armées nationales – l’armée allemande, française, etc. – continueront d’exister. Aucun pays ne mettra son armée sous le commandement d’un autre État européen, que ce soit Paris ou Berlin.

ATIPIK TV : Il y aura donc cette couche extra-européenne, un « surplus » militaire, avec un budget énorme – je ne me souviens plus exactement, mais autour de 800 milliards d’euros ? Pendant ce temps, une partie importante des citoyens européens vit parfois sous le seuil de pauvreté ?

Peter Mertens : C’est cela et troisième point : cette armée supplémentaire n’est pas seulement destinée à intervenir en Ukraine, mais aussi au Sahel par exemple. L’Union européenne continue d’armer l’armée israélienne : la majorité des armes provient des États-Unis, mais l’Allemagne en fournit aussi. Les coopérations militaires avec Israël, le Sahel, etc. continuent. Pour ceux qui croient que cette nouvelle armée européenne est seulement là pour défendre les droits humains, ils se trompent lourdement.

L’Union européenne veut se repositionner comme un empire impérialiste sur la scène mondiale. Bien sûr, ce sont les citoyens qui paieront le prix fort.

La sécurité sociale et la protection sociale seront sacrifiées. Si ce budget militaire est mis en place, on se dirige vers une situation semblable aux États-Unis, où il n’y a presque plus de protection sociale, où la sécurité sociale est quasi inexistante, et où les gens doivent payer des sommes exorbitantes, comme 1 000 euros pour une consultation chez le dentiste. Voilà ce à quoi on s’expose.

Ils vont détruire la sécurité sociale et les services publics pour financer cet armement, qui poursuit deux objectifs :

Les Américains veulent mener la guerre contre la Chine et souhaitent que les Européens s'arment contre la Russie.

L'Union européenne veut créer sa propre armée afin de pouvoir intervenir elle-même, en tant que puissance impérialiste, au Moyen-Orient, au Sahel et ailleurs.

ATIPIK TV : Les pays du Sud de la Méditerranée, notamment le Maghreb, ont-ils raison de s’inquiéter de ce projet de réarmement de l’Union européenne ?

Peter Mertens : Absolument. Ce processus est déjà en cours. Avant même cette phase de réarmement « turbo » impulsée par la Commission européenne, il y a déjà des accords contraignants avec les pays méditerranéens visant à empêcher notamment la migration, avec des politiques de « push-back » policières pour retenir les réfugiés dans ces régions. Ces accords sont presque militaires. Ils ont donc toutes les raisons de s’inquiéter. Cette nouvelle phase est clairement destinée à intervenir dans le futur, notamment dans le Sahel, sous prétexte d’aider à contrer la Russie. C’est le narratif qui sera utilisé.

ATIPIK TV : Mais est-ce pour concurrencer l’OTAN, qui a déjà un dialogue méditerranéen avec ces pays, ou bien pour coopérer avec l’OTAN ?

Regardons l’OTAN aujourd’hui : environ 90% de ses membres sont les mêmes que ceux que Macron veut réarmer à côté. Et la Turquie, qui a participé au sommet à Paris, est membre de l’OTAN. Je crois qu’ils veulent que l’OTAN ait deux jambes : une jambe américaine qui décide de tout, et une jambe européenne.

Mais l’OTAN n’a jamais été une organisation de coopération indépendante. Dès sa création, c’était une arme des États-Unis, contrôlée depuis Washington. Les États-Unis se concentreront sur l’Indo-Pacifique et la Chine, et l’« arme » européenne de l’OTAN se concentrera sur l’Europe. Mais cette jambe européenne restera sous contrôle américain.

ATIPIK TV : Les Européens ne vont donc pas s’émanciper de l’OTAN ni des Américains ?

Il y a bien des discours, notamment en France, avec une rhétorique de « nouveaux gaullistes », mais personne ne réalisera cela concrètement, car toutes les structures militaires de l’Union européenne sont pour l’instant sous la coupe de l’OTAN. Même leur système anti-missile, les avions, tout dépend de l’industrie militaire américaine.

Par exemple, quand la Belgique achète des F-35, c’est l’armée américaine qui contrôle techniquement ces avions. Si les Américains appuient sur un bouton, le F-35 belge ne décolle pas.

Avec le conflit en Ukraine, la nouvelle guerre sera aussi menée par l’intelligence artificielle, par l’utilisation des drones, des satellites. Starlink d’Elon Musk est une aide énorme pour la défense ukrainienne. Tous les pays européens sont un peu dépendants d’Elon Musk et du Pentagone.

Enfin, il y a beaucoup de discours autour d’une « coalition of the willing » entre Londres et Paris, mais en réalité Londres reste sous la tutelle de Washington.

ATIPIK TV : Peter Mertens, vous êtes député fédéral et secrétaire général du PTB, un homme passionnant et passionné. Je voudrais vous poser une question plus terre-à-terre, importante pour nous, les Belges. Il y a 30 ans, le PTB n’avait aucun élu à aucun niveau : municipal, régional, ou fédéral. Aujourd’hui, votre parti connaît une ascension fulgurante. Comment l’expliquez-vous ?

Peter Mertens : Il y a deux aspects : la situation objective et la situation subjective. D’abord la situation subjective, c’est-à-dire comment nous nous voyons nous-mêmes.

Pendant longtemps, dans le miroir, on voyait beaucoup de choses positives, comme la médecine pour le peuple, une génération douée pour le progrès social et le socialisme. Mais on voyait aussi des traits très sectaires et dogmatiques dans le parti.

On a donc engagé un débat en interne : ok, on veut renouveler le parti, mais pas avec des mots creux. On a dit qu’on voulait rester un parti avec des principes sérieux, marxiste et socialiste, mais aussi un parti souple, à l’écoute de la réalité et des gens. L’objectif était de devenir un vrai parti de la classe travailleuse.

Avec ces trois engagements, on a entamé un nouveau chemin. On a rajeuni le parti avec plusieurs générations : la première génération est restée, je suis très content, et de nouvelles sont venues. On a aussi changé notre manière de faire de la politique, en travaillant avec les gens, en construisant la vérité ensemble, pas en la distribuant comme une vérité absolue.

On expérimente, on essaie, on rate parfois, mais on avance ensemble. Cela a marché. Par exemple, pour contrer l’extrême droite, on était actifs dès les années 90, mais malgré cela, elle continuait à croître.

On a compris qu’il fallait aussi travailler à convaincre ceux qui avaient quitté les partis traditionnels, car beaucoup de ceux qui ont basculé vers l’extrême droite venaient de la social-démocratie, dégoûtés par elle. Donc on a dit qu’il fallait être une alternative réelle sur le terrain, un travail difficile mais nécessaire.

Atipik : Pensez-vous qu’un jour, le gouvernement fédéral sera dirigé par la gauche radicale ? je rappelle qu’aujourd’hui, c’est la droite dure qui gouverne, pas forcément l’extrême droite Vlaams Belang, mais c’est la N-VA, à droite voire extrême. Vous ne participez pas au gouvernement actuel, rassurez-moi ?

Peter Mertens : Effectivement, on n’y participe pas.

ATIPIK TV : Ce qui vous caractérise, c’est que vous êtes le seul parti belge sans distinction linguistique. Vous êtes un seul parti pour toute la Belgique, est-ce une des raisons de votre succès ?

Peter Mertens : Absolument. Nous sommes fiers d’être bilingues et multiculturels. Toutes les personnes, de toutes origines, peuvent être membres du PTB. C’est un trait important de notre parti. Pour le moment, on est dans une posture de critique du gouvernement.

ATIPIK TV : Quel est votre pourcentage aujourd’hui ?

Globalement, autour de 10% en Belgique. Dans les sondages, on atteint environ 18% à Bruxelles et en Wallonie, ce qui est énorme.

ATIPIK TV : Un mot de conclusion ?

Peter Mertens : Je suis optimiste. Malgré le génocide, le drame, je crois que la majorité des gens veulent comprendre le monde, cherche

Propos recueillis par Lila LEFEVRE. Peter Mertens, c’est 1,94 m d’endurance et de convictions. Une...

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