18/02/2024
🧿 Une journée dans la vie de Saïd Abou an-Nahs : lundi 15 avril 2002
🧿 Saïd Abou an-Nahs gravit lentement les marches de l'escalier menant à son appartement dans la banlieue nord de Tunis. La fatigue, l'inquiétude et l'irritation pèsent lourdement sur ses épaules, comme si le poids de sa journée pesait physiquement sur lui. La matinée avait débuté avec une confrontation intellectuelle avec un étudiant insolent, Hatem El Mekki, lors de son cours de droit constitutionnel. Ce dernier avait osé remettre en question la pertinence de la réforme constitutionnelle, citant les paroles prononcées par le président le 7 novembre 1987 : “L’époque que nous vivons ne peut plus souffrir ni présidence à vie, ni succession automatique à la tête de l’État desquelles le peuple se trouve exclu”. Saïd avait répondu avec passion, mettant en avant les principes qui avaient guidé le projet de la réforme initié par le président : le renforcement des droits de l’homme dans leur dimension universelle, la consolidation du rôle du pouvoir législatif et la modernisation du système des élections présidentielles. Malgré ses efforts pour argumenter de manière convaincante, il avait senti que sa réponse n'avait pas suffi à impressionner son perturbateur. Hatem, avec son air moqueur et son rire contagieux, avait réussi à déstabiliser l'amphithéâtre tout entier. Saïd avait vu dans le regard d'Abir Ben Ali, une autre étudiante présente dans la salle, une lueur d'insatisfaction. Il savait qu'elle était influente au sein de l'Organisation des étudiants du RCD et craignait qu'elle ne rapporte cet incident au parti.
Dans l'appartement, sa femme, Nadia, le regarde avec préoccupation alors qu'il entre. Elle perçoit immédiatement son état d'esprit tendu mais décide de lui annoncer une nouvelle qui, espère-t-elle, allégera son fardeau. "Monsieur le ministre Sadok Ben Romdhan a appelé vers 15 heures", lui dit-elle avec un sourire plein d'espoir. Mais pour Saïd, le simple nom du ministre fait monter son anxiété à son paroxysme. Il imagine déjà les répercussions de son altercation avec l'étudiant au sein du parti. Les scénarios les plus sombres se dessinent dans son esprit, allant jusqu'à la perte de son poste de directeur du département de droit public et de sa vice-présidence à l'Association 7 novembre de droit constitutionnel.
Soudain, le téléphone retentit, figeant Saïd sur place. Sa femme décroche, et à travers les mots échangés, Saïd sent son cœur battre la chamade. Entendant 'Bonsoir Monsieur le ministre' prononcé par sa femme à l'autre bout du combiné, Saïd sent une bouffée d'émotion le submerger. L'annonce qui suit lui paraît irréelle : le ministre souhaite qu'il l'accompagne pour animer une rencontre sur la réforme constitutionnelle à la cellule de base du RCD à Manar-III. Saïd est abasourdi, puis un rire incontrôlable s'échappe de sa gorge, libérant toute la tension accumulée. Il se précipite vers le téléphone pour remercier le ministre, son soulagement palpable dans sa voix.
Saïd Abou an-Nahs gravit lentement les marches de l'escalier menant à son appartement dans la banlieue nord de Tunis. La fatigue, l'inquiétu...