23/05/2024
Belle initiative !
Jeune, ambitieux, passionné... Il a osé et a réussi à se faire un nom dans la sphÚre littéraire congolaise, il aborde avec soin et amour l'avenir de la littérature au Congo. Lui c'est Sam Zola, éditeur en chef aux éditions du Grand Lac.
Nous sommes allés aux coulisses de son travail. Messieurs et dames notre initié de la semaine répond...
Q/ Pourquoi les éditions du Grand lac? Cette dénomination
âą Ce nom vient du nul. Et parce que la RDC, en sus de faire partie des rĂ©gions des grands lacs, elle est elle mĂȘme un grand lac dans lâidĂ©e selon laquelle elle est riche en ressources humaines et naturelles et quâelle peut alimenter toute lâAfrique. Câest en outre une mĂ©taphore qui ne reprĂ©sente que la grandeur de la richesse culturelle de mon pays.
Q/ Quels sont vos critÚres de sélection pour les nouveaux auteurs
âą L'originalitĂ©, le style, l'intrigue, il m'en convient, demeurent les points essentiels et clĂ©s pour toute sĂ©lection. Partant, la thĂ©matique traitĂ©e par lâauteur(e) demeure lâun des Ă©lĂ©ments indispensables.
Q/ Quelle est la politique de votre maison d'Ă©dition concernant les avances et les royalties ?
âą Cela dĂ©pend de lâattribut que lâauteur aura choisi. Mais gĂ©nĂ©ralement, les comptes de lâensemble des ventes seront arrĂȘtĂ©s une fois par an, Ă une date prĂ©cisĂ©e dans le contrat et seront payables Ă lâauteur au cours du premier trimestre de lâannĂ©e suivante. Câest Ă dire les rĂ©trocessions dâune annĂ©e dâun montant net infĂ©rieur Ă la somme fixĂ©e dans ledit contrat, par ouvrage, ne pourront pas donner lieu au paiement, et seront reportĂ©es sur lâexercice suivant. Par exemple, si lâauteur bĂ©nĂ©ficie de 40 USD de droits dâauteur pour lâannĂ©e n, ses droits dâauteur ne seront pas payĂ©s lâannĂ©e n, mais crĂ©ditĂ©s par avance sur lâannĂ©e n+1.
Q/ Comment se déroule le processus de soumission et d'évaluation des manuscrits?
âą La soumission des manuscrits se fait uniquement par voie Ă©lectronique. Câest ce quâon conseille dâailleurs le plus, car lâĆuvre doit passer entre beaucoup de mains de nos lecteurs puisque le format papier est parfois ou trĂšs souvent difficile Ă gĂ©rer. Le manuscrit passe entre les mains des lecteurs, puis entre celles du Directeur LittĂ©raire qui fera la sĂ©lection. En suite, ce sera moi, en accointance avec ce dernier, qui ferais le choix final dans la sĂ©lection du prochain ouvrage Ă Ă©diter. Et ce, aprĂšs 12 semaines, Ă compter de lâaccusĂ© de rĂ©ception du texte de lâauteur(e).
Q/ Quels services offrez-vous aux auteurs en termes de marketing et de promotion ?
âą Tout dĂ©pend du type dâĂ©ditions. Ces services, concernant le rĂ©fĂ©rencement complĂ©mentaire, la mise en vente et la promotion de lâouvrage, qui dâailleurs permettent dâamĂ©liorer la visibilitĂ© future de lâouvrage et sa promotion sont optionnels et payants.
Q/. Quels sont les droits que vous acquérez lors de la publication d'un livre ?
âą Chaque cession comporte pour Grand Lac le droit de traiter, sous rĂ©serve du droit moral de lâauteur, des droits suivants :tous les autres formats et types de publication papier et numĂ©rique ; haut-de-gamme, illustrĂ©e, de poche, etc. Droit de reproduction de tout ou partie de lâĆuvre au format numĂ©rique sur tout support dâenregistrement magnĂ©tique, optique, numĂ©rique ou Ă©lectronique, tant actuel que futur, et notamment les disques de stockages externes, le CD-ROM, le DVD, etc. Droit de numĂ©risation, enregistrement et reproduction de tout ou partie de lâĆuvre sur les mĂ©moires de tout appareil permettant de stocker des donnĂ©es numĂ©risĂ©es tels que les disques dur dâordinateur, les tablettes, les liseuses, les tĂ©lĂ©phones portables, etc.
Q/. Pouvez-vous me donner des exemples de livres que vous avez récemment publiés et qui ont bien performé sur le marché ?
âą Bien que la liste ne soit pas exhaustive, mais en premier lieu, je citerai Sur les pavĂ©s de la RĂ©publique, de Tony ELEBE ma Ekonzo ; Cris de mes entrailles, dâHervey Nâgoma ; La vie comme elle va, dâĂlisabeth Mweya, RĂ©pliques Assassines de PG Manjolo.
Q/ Que doit-on faire pour parvenir à une politique littéraire stable et durable?
âą Nous nâavons pas que besoin dâune politique littĂ©raire sâil mâen convient de me prononcer pour un cas gĂ©nĂ©ral. Il faut penser, rĂ©flĂ©chir, mettre en place une politique culturelle, que nous manquons malheureusement dans un pays qui se veut riche en sa diversitĂ© culturelle, qui peut rĂ©pondre Ă lâexigence du temps et projeter vers lâavenir une relĂšve assurĂ©e.
Q/ Quelles sont les insuffisances que vous avez constatĂ©es dans lâindustrie du livre?
âą Le Congo nâa pas une identitĂ© intellectuelle culturelle. Il est vrai quâaujourdâhui lâon constate la demande du livre dans notre pays se dĂ©velopper rapidement sous le double effet de la croissance dĂ©mographique et dâune scolarisation intensive. Mais les structures dâoffre et de production du livre sont restĂ©es rigidesâ inĂ©lastiques et ne suivent pas les Ă©volutions de la demande globale. Cette situation crĂ©e un dĂ©sĂ©quilibre structurelâ permanent dans le marchĂ© du livre et a des consĂ©quences inĂ©vitables sur lâensemble de la structure Ă©conomique du pays puisque faute de trouver au Congo une offre locale correspondanteâ lâexcĂšs de la demande se traduit par des importations massives des livres en provenance des pays de la francophonie. Car pour ceux-ciâ le Congo constitue un vaste dĂ©bouchĂ© commercial encore inexploitĂ©. La dĂ©pendance du pays a donc tendance Ă accentuer le dĂ©sĂ©quilibre de nos paiements extĂ©rieurs.
Si doncâ par des mesures de soutien de tous ordresâ les pouvoirs publics ne parviennent pas rapidement Ă amĂ©liorer les conditions gĂ©nĂ©rales chez les porteurs intellectuels et matĂ©riels du livreâ si les structures de pensĂ©e nâĂ©voluent pas vite dans le pays pour favoriser une production massiveâ Ă bon compteâ de manuels scolaires adaptĂ©s Ă la psychologie de lâenfant congolaisâ de bons ouvrages scientifiques et techniquesâ on aboutira rapidement Ă un dĂ©ficit plus importantâ trĂšs prĂ©judiciable pour notre avenir culturel et qui sera ni plus ni moins la mesure de notre dĂ©pendance culturelle vis-Ă -vis de lâextĂ©rieur.
Le Congo est pourtant un pays bien Ă©quipĂ© en matĂ©riel dâimpression puisquâil possĂšde de nombreuses imprimeries et presses rotatives. Ă Kinshasa dĂ©jĂ â on compte plus de 2000 imprimeries installĂ©es. Certaines dâentre elles sont mĂȘme des plus modernes et nâont rien Ă envier aux structures de presse dans les pays dĂ©veloppĂ©s.
Mais il serait vain de dissimuler le fond des choses. Au Congoâ le vrai problĂšme de lâĂ©dition se situe ailleurs. Les machines et les Ă©quipements sont une choseâ les hommes pour les actionner en sont une autre.
Beaucoup de nos imprimeries ne peuvent exĂ©cuter que des tĂąches commerciales courantes : imprimĂ©s commerciauxâ facturesâ cartes de visiteâ de mariage ; tickets de busâ dĂ©pliants publicitairesâ Ă©lectorauxâ quelques rares revues. Un point câest tout. Ăa sâarrĂȘte lĂ .
Elles nâont guĂšre le personnel pour assurer la composition dâun livre scientifique ou technique. Quand on les interrogeâ nos imprimeurs rĂ©pondent habituellement que la composition et lâimpression dâun livre prend du temps et ne comporte que des nuisances du mĂ©tier. Elle ne rapporte pas beaucoup dâargent, ce qui est peut-ĂȘtre vrai en partie... Mais quâĂ cela ne tienneâ beaucoup dâentre elles se seraient vite reconverties Ă©tant donnĂ© la conjoncture nationale et internationale trĂšs mauvaise. En effetâ le nombre croissant dâimprimeries installĂ©es devait pousser Ă une plus grande spĂ©cialisation et conduire les imprimeurs Ă exĂ©cuter des tĂąches non courantesâ ce nâest pas le cas bien quâelles ne tournent pour la plupart quâĂ moitiĂ© de leur capacitĂ© potentielle.
Vu dans leur profondeurâ les problĂšmes de nos imprimeurs se situent bien ailleurs. Ils sont essentiellement techniques. Le personnel qualifiĂ© pouvant assurer la composition dâun livre fait souvent dĂ©faut dans nos imprimeries. Lâon doit Ă la vĂ©ritĂ© reconnaĂźtre quâun livre scientifique ou littĂ©raire nâest pas un reportage de football. Câest la tĂąche de longue haleine.
Mais lĂ aussiâ si les Ă©diteurs ne sont pas limitĂ©s voire effrayĂ©s par des dĂ©lais de livraison trĂšs longsâ ils le sont par le coĂ»t dâimpression souvent exorbitant. Et les Ă©diteurs qui sont pourtant les clients directs des imprimeries, se trouvent pris dans un engrenage sans issue qui nâassure point la promotion de leurs activitĂ©s.
Les problĂšmes de lâĂ©dition comme de lâimprimerie au Congo se situent donc en grande partie du cĂŽtĂ© de la formation professionnelle des cadres. Ce secteur a davantage besoin dâhommes formĂ©s et crĂ©atifs. Il a besoin de bons compositeurs, de bons correcteursâ de bons lecteurs des travaux scientifiques, littĂ©rairesâ de la rĂ©daction et de la composition françaises.
Q/ Si on vous demandait de citer quelques bons Ă©diteurs congolais, Ă qui penseriez vous en premier?
âą Jâen connais un seul. Il fait bien son travail. Câest jeune Ă©diteur de 24 ans presque, il mâen souvient. Il consent tout son temps pour pouvoir produire des Ćuvres exceptionnelles, de bonne qualitĂ© qui nâont rien Ă envier des pays de lâEurope. Bravo Ă lui, M. Sam Zola.
CharlĂšne Isambi
Book'ulture