29/10/2025
On entend beaucoup parler de naïveté en ce moment.
Dans un environnement où la force brute redevient parfaitement assumée, il serait naïf, oui, de parler de paix, de non-violence, de dialogue, de droit.
Négocier avec le Hamas ? Naïf.
Signer un accord avec Trump ? Naïf.
Penser que le droit nous protège encore ? Naïf.
Imaginer une transition écologique douce et non-violente, une décroissance ? Naïf.
Le mot revient partout, comme un reproche, une moquerie, un verdict. Parfois d'ailleurs à juste titre (attention, je me mouille!!!).
Mais derrière, il y a une question beaucoup plus sérieuse : que fait-on de la violence dans nos sociétés ?
Parce qu’elle est là, sous toutes ses formes dans les discours politiques, les algorithmes de nos écrans, les luttes économiques, les rapports sociaux.
Et elle structure nos comportements plus qu’on ne veut bien l’admettre.
On oppose souvent les “réalistes”, ceux qui se réclament de Hobbes ou de Machiavel, aux “idéalistes”, qu’on taxe volontiers de doux rêveurs.
Les premiers diraient : le monde est un champ de forces, la peur structure l’ordre.
Les seconds répondraient : non, l’homme est naturellement bon, c’est la société qui le déforme.
Mais cette opposition est peut-être mal posée.
Parce que la violence n’est pas un choix moral, je la vois plutôt comme matériau politique.
Elle fait partie du jeu, comme la gravité fait partie de la physique.
Ce qui change, c’est la façon dont on la canalise.
👉 Petit tour de quelques vieilles têtes pensantes :
- Hobbes pensait qu’il fallait un arbitre fort, un Léviathan, pour éviter la guerre de tous contre tous.
- Rousseau croyait à la pitié, à la capacité des mœurs à calmer la brutalité.
- Machiavel décrivait la mécanique du pouvoir : la peur, l’amour, la stabilité.
- Jared Diamond, lui, dit que les sociétés sans État ne sont pas forcément plus pacifiques, juste moins capables de détruire à grande échelle.
Ma conviction, c’est que la violence fait et fera toujours partie du social.
Elle est une énergie disponible, tout le temps, partout.
La question, c’est donc : comment on la contient.
Réponse simple : par des règles, des digues, des institutions, des rituels, des récits communs.
Et le problème aujourd’hui, c’est que ces digues se fissurent : la justice est contestée, le droit se tord, les mots se vident, la confiance s’érode.
Et quand ces structures cèdent, la violence remonte.
Mon dernier épisode de Sismique est consacré à ce sujet.
On ne fabrique pas la paix en fermant les yeux sur la violence.
🎧 Pourquoi les gentils perdent (souvent) ? Sans violence, pas de civilisation
👉 Cherchez SISMIQUE sur vos applis.
(Dans cet épisode je donne suite à ma conversation avec Pablo Servigne pour explorer un point de désaccord)