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31/05/2020
LA CHRONIQUE DE DROIT PUBLIC DU DR JORAM VIXAMAR
Je me souviens du vieux dicton de Rabelais selon lequel : « Science sans conscience n'est que ruine de l'âme. » Cela étant dit, une connaissance qui ne permet pas à l'homme de se l'approprier et de progresser, est donc inutile. De ce fait, en tant que théoricien et juriste du droit public, en dehors des cours que je donne dans les établissements supérieurs haïtiens et d’autres activités que je réalise dans la société entourant mon champ de compétences, je tiens desormais à apporter au public une rubrique appelée : « La chronique de droit public du Dr Joram VIXAMAR». Cette rubrique consiste à présenter régulièrement au public haïtien, à travers les réseaux sociaux (Facebook, twitter, etc.), un sujet de droit public à l’écrit ou à l’oral. En ce sens, des outils juridiques et/ou des instruments juridiques nationaux et internationaux seront présentés et analysés à cet espace en vue de permettre au public de mesurer leurs portées ainsi que leurs retombées sur la société haïtienne. Déjà, je souhaite à vous toutes et à vous tous, Haïtiennes et Haïtiens, bienvenue à ma rubrique juridique.
Pour commencer cette rubrique, je tiens à mettre le cap sur la loi suprême de la nation, à savoir la « Constitution » en répondant à la question : « Qu’est-ce que la Constitution ? »
La Constitution est définie comme « une norme juridique essentielle en raison de sa fonction première qui est d’énoncer les règles touchant à l’organisation et au fonctionnement des institutions politiques. C’est la règle fondamentale qui montre aux gouvernants que leur pouvoir n’est pas absolu et qu’ils doivent respecter des règles qui leur sont supérieures. En d’autres termes, la Constitution est la norme qui fonde l’Etat de droit » (Guillaume MERLAND, 2010).
La Constitution n’est pas une notion facile à appréhender étant donné qu’elle renvoie à diverses acceptions, en fonction du choix de l’Etat en question. Dans ce cas, la Constitution peut être écrite ou coutumière. Elle peut être aussi envisagée dans un sens formel ou matériel. Cependant, la doctrine établit une distinction entre les Constitutions écrites et celles qui sont coutumières : la Constitution coutumière est un ensemble de règles relatives à l’organisation du pouvoir, qui n’existent pas sous forme écrites, même si certains documents peuvent servir de base (comme règles de bonne conduite). Il convient de souligner que les premières Constitutions ont été coutumières. D’ailleurs, jusqu’à la fin du XIIIe siècle, l’absence des règles constitutionnelles a trop souvent entravé le travail du pouvoir politique, car ces règles constitutionnelles ont été transcrites par voie de coutume. A titre d’exemple, en France, dans l’Ancien régime ce sont les « lois fondamentales du royaume » qui formaient un embryon de Constitution coutumière. Elles concernaient notamment les règles de succession au trône et l’inaliénabilité du domaine royal.
Cependant, l’avènement de la philosophie des lumières et la rénovation politique, au cours des XVIIIe et XIXe siècles, ont favorisé le développement des Constitutions écrites et, par conséquent, les Constitutions coutumières ont progressivement disparu. Par opposition à la Constitution coutumière, la Constitution écrite possède un corpus général initié de textes et/ou de principes de Gouvernement considérés comme essentiels. Donc, une Constitution écrite est formalisée dans un texte unique ou un ensemble de lois constitutionnelles. Elle représente désormais la grande majorité des Constitutions modernes. Et, progressivement, à la fin du XIIIe siècle, les Etats commençaient à se doter des Constitutions écrites, jugées plus rassurantes pour faire évoluer la nouvelle philosophie politique axée sur la démocratie. Ainsi, est écrite dans l’Etat de Virginie, le 29 juin 1776, la première Constitution, puis les Etats Unis ont approuvé leur Constitution le 17 septembre 1787 et la France sa première Constitution écrite, le 3 septembre 1791. Progressivement, les Etats ont continué à écrire et à adopter des Constitutions écrites. La République d’Haïti a adopté sa première Constitution écrite, tout de suite après les Etats Unis d’Amérique et la France, avec la Constitution impériale de 1805 bien qu’il y eût déjà dans la période précédant la Constitution de 1801.
De surcroit, on distingue les notions de Constitution matérielle et Constitution formelle, lesquelles renvoient à des sens divers. La Constitution est dite matérielle à partir de son contenu (l’organisation du pouvoir). Dans ce cas, elle renvoie à l’ensemble des règles, écrites ou non, qui touchent à l’acquisition et à l’exécution du pouvoir, tandis que la Constitution formelle renvoie à son mode d’adoption et de révision. Dans ce cas, elle est conçue comme un acte constituant un ensemble de règles juridiques adoptées par une autorité spéciale (le parlement, par exemple) ou par une procédure spéciale (referendum, entre autres.). En conséquence, la République d’Haïti, de 1804 à nos jours, a connu des Constitutions écrites, matérielles et formelles. (VIXAMAR, Joram, « L’Etat central et les collectivités décentralisées d’Haïti : étude des relations dans le processus de décentralisation », thèse en droit public, Rennes II, 2019, dir. Corinne Delon Desmoulin)
M. Joram VIXAMAR
Docteur en droit public de l’Université Rennes 2, France
Membre associé du Laboratoire Interdisciplinaire de Recherches en Innovations Sociétales (LiRIS ) de l'université Rennes 2.
Courriel :[email protected]