19/06/2023
Plus d'un million de candidats pour les concours directs niveau BAC et plus: et si l'on crevait l'abcès pour sauver la jeunesse ?
Il y a quelques mois de cela, j'avais un problème de climatisation avec ma voiture et mon garagiste m'a dit d'aller voir un jeune dans le quartier Paspanga qui est spécialisé dans la réparation de la climatisation automobile. Effectivement, je suis allé le voir. Son accueil est sympathique. Il est jovial. Il a bien réparé la climatisation pour me permettre de bien circuler parce que nous, les grands, nous ne pouvons pas circuler dans des voitures chaudes comme les gens de Fada, de Zabré ou les grands buveurs de dolo du marché de Réo.😀.
Quand le jeune a fini, j'ai d'abord remarqué qu'il employait trois jeunes dans son atelier et je lui ai demandé, quelles études, il a faites. Il m'a dit qu'il a un bac professionnel dans le domaine du froid et de la climatisation. Et je lui ai dit: " jeune homme, c'est toi qui as été à l'école. C'est toi qui es utile pour le Burkina. C'est toi qui as étudié". C'est pour dire que l'employabilité des jeunes diplômés est aujourd'hui un véritable casse-tête. Comment comprendre que plus d'un million de jeûnes gens se présentent aux concours de niveau BAC et plus? Notre école va mal et notre système éducatif est inadapté aux réalités du marché. En fait, ce n'est pas le travail qui manque au Burkina, mais les jeunes ne sont pas formés pour le travail. Voilà le contraste.
Nous sommes dans un système éducatif devenu un véritable goulot d'étranglement. Il est difficile de s'en sortir dans la société quand on passe 18 années à l'école. Cela ne veut pas dire que l'école est mauvaise ou que les diplômes ne servent à rien. C'est notre école et notre façon de chercher les diplômes qui posent problème. Notre école doit être pratique et pragmatique et répondre aux besoins de notre société. C'est pourquoi je pense que les jeunes, surtout les enfants des pauvres, doivent mettre l'accent sur le travail et non pas sur la recherche des diplômes. Il y a un temps pour travailler , mais il n'y a pas un temps pour faire une licence ,un master ou un doctorat. Un fils de pauvre doit travailler entre 22 et 30 ans et fonder une famille et commencer à faire des enfants. C'est important. C'est pour cela que rentrer à l'université de façon classique à 22 ans pose déjà problème. On s'expose à une longue souffrance.
Les jeunes gens doivent être réalistes. Il faut travailler à cet âge pour se nourrir, pour fonder une famille et on pourrait chercher des diplômes en utilisant son propre argent dans le but d'avoir de la promotion. Même en Europe, des gens passent le bac à cinquante ans. Mais, ils vont composer en roulant dans leurs voitures et en dormant dans des villas. Quand j'ai eu mon bac alors que j'avais 27 ans, mon professeur d'anglais m'a dit:" SIGUIRE, ne fais pas des études universitaires une préoccupation, cherche à bien t'insérer dans la société." Et il avait raison. Je continue toujours mes études et cela ne me pose aucun problème. D'ailleurs, tous les jeunes gens avec qui j'ai étudié dans tous les départements sont contents de me côtoyer, car c'est l'étudiant bailleur qui n'hésite pas à donner de l'argent pour les travaux de groupe et autres choses. Étudier n'est pas mauvais en soi, mais il faut savoir étudier, surtout quand on vient d'une famille pauvre .
Aussi, l'État doit changer la politique de l'éducation. C'est un véritable défi à relever. Les jeunes sont formés dans des filières pratiquement inutiles. Si un pays a besoin de littéraires, de philosophes, de sociologues d'économistes et autres, plus de mille licenciés par an en lettres modernes, en philosophie, en sociologie, en droit et en économie pour le Burkina, c'est un véritable cul de sac. Et il faut le dire. Et comme l'a dit Salif DIALLO, aucun pays ne s'est développé avec des poètes. La littérature, la philosophie et la sociologie contribuent au développement, mais notre pays a plus besoin d'ingénieurs, d'informaticiens, de techniciens et même de soudeurs, de maçons, d'agriculteurs professionnels, que de littéraires , de philosophes et de sociologues. Comme je l'ai dit lors d'une conférence à Dédougou, au grand marché de cette ville, personne n'a besoin d'un philosophe ou d'un littéraire. Ils ont besoin de clients qui ont l'argent.
Je suis de ceux qui se battent pour la révolution dans notre système éducatif. Il faut supprimer les départements de lettres modernes, de philosophie, de sociologie, d'histoire, de droit et d'économie dans toutes les autres universités. L'université Joseph KI ZERBO seule devrait avoir ces départements. Dans les autres universités et centres universitaires, il faut former les jeunes dans les filières professionnelles,industrielles, technologiques, scientifiques et agricoles. C'est dur à entendre et les esprits réactionnaires vont encore m'insulter. Mais, je le dis toujours: ma pensée est souveraine et je n'ai peur de rien, surtout pas des critiques..Allons vers le développement en formant les jeunes à l'emploi et non pas aux bruits et aux injures. De toute façon, rien ne changera dans les conditions matérielles de vie des jeunes gens qui viendront insulter sur cette publication. Du reste, c'est la faim, la misère et le manque d'emploi qui rendent certains jeunes colériques, agressifs et qui les poussent à insulter. Quand on mange bien, on dort bien et on a l'argent dans sa poche, on est préoccupé par ses projets, on n'a pas le temps pour les injures et autres dénigrements.
Dieu bénisse le Burkina.
Adama Amadé SIGUIRE
Écrivain professionnel/ Consultant.