23/11/2024
Laurent Kilachu BADO est considéré comme intellectuel, homme politique et, à certaines occasions, humoriste. C’est cette combinaison de profils qui lui a donné son important auditoire et l’aura dont il bénéficie au Burkina Faso. Ses discours sont diffusés et rediffusés, notamment par les jeunes burkinabés, via leurs téléphones mobiles. Ses prises de parole depuis 1980, ont toujours été empreintes de franc parler.
Né le 28 août 1945 à Zoula, Laurent BADO est Professeur de droit constitutionnel et homme politique burkinabé.
Issu d’une famille catholique et ayant un père catéchiste, Il suit une éducation scolaire catholique et commence ses études primaires à Réo puis le cycle secondaire au petit séminaire de Koudougou. Il obtient un baccalauréat en philosophie en 1967.
La suite de son parcours l’amène à quitter le Burkina-Faso pour une licence à la Faculté de droit et de sciences économiques de l’Université d’Abidjan qu’il termine en France à la Faculté de droit et de sciences sociales et politiques de Bordeaux I. Il passe un an à Bordeaux, de 1970 à 1971 et poursuit son séjour étudiant en France à l’Institut international d’administration publique de Paris, puis rentre au Burkina-Faso en janvier 1973 alors qu’il a 28 ans. Il est alors amené à suivre de près l’actualité politique de son pays en occupant plusieurs postes de la fonction publique :
- De 1973 à 1974 il est administrateur civil stagiaire au Ministère du Travail et de la Fonction Publique ;
- De 1974 à 1975 il est directeur du recouvrement et du contrôle des risques à la Banque nationale de développement (BND), puis conseiller technique du Ministre du travail et de la fonction publique et directeur de la fonction publique ;
- de 1978 à 1979 il est à nouveau conseiller technique de ce même ministère ; puis il en change pour devenir conseiller du Ministre chargé des relations avec le Parlement.
- En 1980, il est nommé directeur de l’Ecole Nationale d’Administration (ENA) et restera à cette place jusqu’en 1983.
Il obtient un Diplôme d’Etat Approfondi (DEA) de droit public fondamental puis, un doctorat d’Etat en droit public (1981).
Sous la révolution, Laurent BADO est viré de son poste de professeur permanent de l’ENA où il était Directeur et mis à la disposition de l’Université de Ouagadougou pour emploi, l’administration le considérant comme un « fonctionnaire ingérable ». Il entre alors à l’Ecole supérieure de Droit de Ouagadougou comme assistant (1984), maître-assistant (1986) et enfin professeur de droit administratif.
Par la suite, c’est lors de ses cours que BADO se fera tout particulièrement remarquer. Il est l’un des professeurs de l’université de Ouagadougou qui remplit le plus les amphithéâtres. Les étudiants se pressent pour suivre ses cours, non seulement pour la qualité de son enseignement mais aussi pour son franc-parler et ses prises de position critiques sur la présidence de Blaise Compaoré. Des cours où il exprime, de façon simple, humoristique et souvent provocatrice son avis sur la gouvernance du pays. Il n’était pas étonnant de voir des étudiants en médecine, philosophie, histoire, etc. se ruer sur les amphithéâtres accueillant les cours de droit pour écouter le Pr Laurent BADO.
En 2000, créé le Parti de la Renaissance Nationale (PAREN) et obtient quatre sièges à l'Assemblée Nationale lors des élections de 2002. En 2005, pour les élections présidentielles, le PAREN s’allie avec le Mouvement du Peuple pour le Socialisme - Parti Socialiste (MPS-PS) d’Emile Paré et créent alors l’Opposition Burkinabé Unie (OBU). Mais avant même que la campagne électorale ne commence, les partis se disloquent pour une affaire de 30 millions. Laurent BADO avoue avoir reçu une "aide" de 30 millions de FCFA de la part du président Blaise Compaoré et déclare que son allié Emile Paré a également reçu cette somme. Cette "aide" crée un scandale et contribue à scinder l’alliance. C’est donc séparément que les deux candidats se présentent. Laurent BADO arrive en troisième position avec 53 743 voix soit 2,60% des suffrages, tandis qu’Emile Paré arrive en 10ème position (sur 13 candidats) et obtient 17 998 voix, soit 0,87% des suffrages. C’est dans la ville de Koudougou, proche de son village natal que Laurent BADO obtient son meilleur score, 9,40% des voix, et arrive en seconde position derrière le président sortant. Le candidat BADO avait donné un meeting dans cette ville à l’occasion de sa campagne en novembre 2005, seulement quelques jours après celui de son indétrônable adversaire. Alors que Compaoré avait rempli le stade de la ville, était arrivé en hélicoptère et avait annoncé de nombreux et généreux investissements pour la ville, Laurent BADO n’avait regroupé qu’une centaine de personnes dont la majorité étaient des étudiants venus pour passer un bon moment et s’amuser à écouter « le fou qui dit la vérité ». S’il s’est présenté aux élections, il dit néanmoins ne pas vouloir le pouvoir. Il explique qu’un tel vœu est pour lui impossible au Burkina-Faso car d’une part, il n’est pas de l’ethnie majoritaire (Mossi) et d’autre part, il n’en a pas les moyens. Il dit préférer « éveiller les consciences ». C’est ce qu’il s’attache à faire avec ses tirades humoristiques. L’un des ressorts de cet humour repose sur sa vision critique de l’Occident. Il revient régulièrement sur l’ « impolitesse » et l’indifférence des citadins, leurs rapports sociaux « sans chaleur » ; il critique vivement le traitement laxiste envers les anciens. Néanmoins, il dit avoir apprécié certaines personnes en France : « les paysans de La Creuse », qui lui auraient fait penser aux paysans de son village. Il prône ainsi un retour à la ruralité et aux traditions. Parmi ses déclarations les plus provocatrices, il défend notamment la dot, la polygamie, l’excision ou encore l’exclusion de la propriété foncière pour les femmes. Il défend le monde rural et fustige une vie citadine où se concentreraient tous les maux de la société, que ce soit en France ou en Afrique.
Laurent BADO illustre une « conscience d’opposition » populaire, notamment du fait de sa critique de l’Occident ; mais il est aussi considéré comme peu crédible en raison d’un excès de légèreté et, d’une soumission à un gouvernement qu’il est difficile de critiquer frontalement si l’on souhaite continuer à prendre la parole. Selon lui, le problème majeur des Africains est le mimétisme. Il prône le grégarisme comme modèle de société pour l'Afrique en général et le Burkina Faso en particulier. Modèle qui offre une alternative aux systèmes capitalistes et socialistes qui selon lui ont montré leurs limites.
Dans PAREN, le testament de Laurent BADO, il définit le grégarisme appliqué à l'Afrique comme la mise en place d'une économie populaire : « La voie de l'Afrique(...)(est) bel et bien le grégarisme de la tradition qui distingue la liberté et la solidarité sans les séparer, qui unit l'individu et le groupe sans les confondre. »
Laurent BADO est également porteur de grandes idées de développement telles que l'actionnariat communautaire, le développement endogène, etc.
Lors de l'élection présidentielle de 2010, n'ayant pas réussi à convaincre sur la candidature unique de l'opposition, Laurent BADO renonce à se porter candidat et le PAREN ne présente aucun candidat.
Il réussit à se faire réélire député lors des élections couplées de 2015 et rejoint la mouvance présidentielle conduite par le président Roch Marc Christian KABORE. Cependant, cette alliance ne l'empêche pas de critiquer ce régime et de dénoncer ses tares.
En 2017, Laurent BADO s'embrouille avec son jeune frère Tahirou BARRY, président du PAREN et exclu ce dernier lors d’un congrès organisé par le parti. Ces tensions fragilisent le parti qui n'obtient aucun siège aux élections législatives de 2020.
Il a une position très tranchée sur l'homosexualité qu'il qualifie de crime contre l'humanité en appelant les Africains à faire preuve de vigilance sur la conservation des acquis culturels de la société. Il est également un grand partisan de la peine de mort.
Lors des élections auxquelles il a pris part, Laurent BADO a toujours clamé aux populations lors des meetings et débats télévisées qu'il n'est pas venu quémander des voix ; mais plutôt leur montrer un chemin, celui pouvant sortir le pays de la souffrance et lui offrir un avenir radieux.
Laurent BADO s'est retiré de la scène politique.
Il a écrit plusieurs ouvrages que sont : Ni l’est, ni l’ouest ; Au-delà du libéralisme et du socialisme ; L’Alternative ; Quel modèle de démocratie pour l’Afrique noire ? ; La liberté humaine en occident et en Afrique ; L’Eglise catholique et le pouvoir politique ; La femme traditionnelle est-elle discriminée ? ; Mort au libéralisme, Mort au socialisme ; Le grégarisme africain ou la mort ; Le journal d'un vacancier ; Mon expérience Politique ; Mes 29 propositions et leurs 123 mesures de mise en œuvre pour transformer le Burkina en Profondeur ; Un chrétien catholique s'interroge ;
Laurent Bado a passé les premières années de sa vie à animer bénévolement des conférences dans les localités du Burkina Faso.