Cabinet de Lecture

Cabinet de Lecture L'intelligence et l'action pour vivre !

20/03/2024

« Il convient de remarquer que les Kinkirsi, comme tous les esprits, ont la faculté d’effectuer de longs trajets en peu de temps. Pour eux les distances diminuent. On prétend que pour effectuer des voyages ils montent sur des chacals, qui leur servent de chevaux. Quoiqu’il en soit, nos constatations personnelles nous permettent de dire qu’ils ne mettent pas plus de 10 minutes pour parcourir une distance de 2 kilomètres et retour. »

In LES SECRETS DES SORCIERS NOIRS
AUTEUR : DIM DOLEBSOM A.A

20/03/2024

« Comment la science des Kinkirsi est mise à la portée des hommes. — Comme chez les hommes, il y a, parmi les esprits, des êtres privilégiés qui connaissent l'avenir. D'autres esprits vont les consulter. Ils entreprennent, di-ton, des voyages, à la façon des Mossis, qui s'en vont parfois à plus de 100 kilomètres consulter des devins réputés. Il arrive souvent que les Kinkir'bagha veulent éclairer les hommes sur les événements importants de leur vie ou leur permettre de conjurer certains sorts. Cependant ils ne peuvent entrer directement en rapports avec eux. Qui, du reste, aurait l'audace de consulter un esprit invisible ? Aussi choisissent-ils de préférence une jeune fille ou une femme qu'ils adoptent pour mère. Ils soumettent la malheureuse créature à de dures épreuves. Ils la cachent dans la brousse, où elle demeure parfois un mois entier, si bien que les parents croient à sa disparition. Les Kinkirsi, pendant cette retraite, donnent, affirme-t-on, à manger à la jeune fille des aliments succulents. Un jour, ils la rendent à sa famille. Lorsqu'elle narre à cette dernière qu'elle a été capturée par les Kinkirsi quelle désolation, quel trouble dans la famille ! On raconte partout au village que la fille d'un tel est fréquentée par les Kinkirsi. Ces esprits rendent par intervalles des visites à leur mère adoptive. A leur tour, ils partagent avec la fille ses repas ; ils vont même jusqu'à lui réclamer certains aliments de leur choix ; ce n'est que lorsqu'ils la sentent suffisamment mûrie pour le dessein qu'ils ont formé qu'ils l'adoptent définitivement pour mère.
Désormais elle est bagha (devineresse). Chaque fois qu'elle aura besoin de ses « enfants », il lui suffira de prendre l'instrument d'appel, le silsaka et de le secouer fortement. Partout où ils se trouveront, quelle que soit l'occupation à laquelle ils se livraient, ils répondront à l'appel »

In LES SECRETS DES SORCIERS NOIRS
AUTEUR : DIM DOLEBSOM A.A

« Les Africains ont, autant que nous, civilisés d'Europe, besoin de se protéger contre les atteintes de ce je ne sais qu...
17/03/2024

« Les Africains ont, autant que nous, civilisés d'Europe, besoin de se protéger contre les atteintes de ce je ne sais quoi qui contrecarre sans cesse la logique humaine, notre égoïsme, et le sens de la pitié. La société noire est plus proche que la nôtre de l'accident où la nature déconcerte chaque jour notre raison. Le travail mieux ordonné est ainsi réduit à néant par l'instabilité des saisons. Les pluies d'hivernage manquent ou sont mal réparties, les graines nourricières ne germent pas, le mil en herbe sèche aux ardeurs du soleil, l'épi ne se forme pas ou est ravagé par les insectes. Mille aventures inattendues abolissent la confiance des êtres dans la prévoyance ou la bonté de la nature. Un vol de sauterelles dévore à I ’improviste la verdure. Un incendie détruit les greniers qu'on vient d'emplir. La foudre, au cours d'un orage, tombe sur le hameau, sur la soukala qui flambe. Des groupes d'hommes ou d'animaux sont sidérés. Des maladies inexplicables frappent soudain l'individu le plus robuste, abolissent ses générations, exterminent le bétail. Un être bien portant s'affaiblit peu à peu, se plaint qu'un vampire lui dévore le cœur et s'éteint, il a la surprise indignée de ses parents. Une femme robuste accouche d’un enfant de belle apparence qui meurt, d'une mort déconcertante. Un lion ou une hyène à crinière, ou une panthère s'enhardit sans motif plausible, coupe la route ou s'introduit dans une case et devient mangeur d'hommes. Une pirogue se retourne et ceux qui la montent se noient. Un arbre d'apparence solide croule sur le voyageur qui, de hasard, suivait le sentier. Une guerre bien préparée contre le village voisin tourne soudain à la calamité pour celui qui l'entreprit. Un peuple belliqueux s'enrichit, assemble quantité de captifs qui exécutent en son lieu les travaux de la terre ; un jour les captifs se révoltent et les maîtres de la veille sont le lendemain des esclaves de leurs esclaves.
Cependant la société noire est organisée de manière à lutter de son mieux contre l'hostilité de l'ambiance. Elle exploite les moindres possibilités de la nature. Elle est d'une contexture serrée. L'individu n'est point abandonné au hasard. Il appartient à un clan hiérarchisé. Il obéit à la coutume qu’établirent ses aïeux pour s'adapter aux luttes et aux nécessités de la brousse, comprendre ses exigences, prévoir et éviter l'événement fortuit. Il ne s'élève point contre la fatalité qui gouverne la vie, mais contre le fait qui survient et interrompt cette fatalité. Il voit l'effet et cherche à connaître la cause ; dans cette connaissance est le remède des maux subits qui l'accablent. Une tendance évidente de l'esprit nous porte à individualiser, à humaniser les forces de la nature ; nous penchons à considérer chacune d'elles comme autonome, et il estime qu'elle agit dans un but particulier. Bref, nous introduisons dans sa manifestation un élément de volonté ; nous y intercalons un esprit. Ne nous arrive-t-il pas, même, à chaque instant du quotidien, d'inculper ou de maudire la résistance qu'oppose tel ou tel objet à notre désir : un parapluie ne veut pas s'ouvrir, un crayon s'obstine à s'épointer, un engrenage refuse de tourner, etc. Nous nous effaçons devant l'irruption d'adversaires malintentionnés. Les notions de chance, de probabilité, de hasard, sont placées sous la dépendance d'obscures entités tantôt favorables, tantôt malveillantes. Notre inconscient, lieu de rencontre de la pensée en gestation et de l’instinct, n'admet point la neutralité des puissances qui agissent autour de nous. On ne sait quelles correspondances nous attachent à elles ; leurs caractères demeurent inconnus ; elles sont — et nous n'allons pas plus loin. Le sentiment que l'homme a de l'obstacle, son intuition d'une volonté qui s'oppose à la sienne, sont à la base de la magie. Celle-ci a pour dessein de rétablir l’équilibre de la raison humaine et de la nature. Son action aboutit à dompter l'influence rebelle. Force contre force, volonté contre volonté ! Elle concentrera, par exemple, la volonté de l'homme sur un objet particulier, qui écartera de son possesseur les forces farouches. Ou bien elle domestiquera celles-ci par la vertu d'un cérémonial plus ou moins complexe. Certaines substances ont pour propriété soit de fixer en elles la demeure des entités agissantes ; soit d'accueillir et de retenir le vouloir d’un magicien. Ces substances, traitées selon les rites prescrits par la tradition occulte, seront honorées comme il convient, permettront de gouverner les forces et de les incliner à la bienveillance ou de les lancer à l'attaque d'autres forces. C'est ainsi que naît le fétiche. Il est une arme à la fois défensive et offensive. Nombre de civilisés admettent que le port d'une branche de corail rouge neutralise le mauvais œil, qu'un morceau de charbon de bois, placé en poche, écarte le volt maléficient, que la statuette de saint Christophe, vissée sur le bouchon d'un radiateur, assure le bon voyage de l'automobiliste, que le baptême au champagne d'un bateau ou d'un avion le préserve des accident, que la corde de pendu est un porte-bonheur, et que certaines paroles, certains gestes, certains voisinages, certains bijoux suspendent ou amollissent la menace de l'inconnu. Le noir africain ne pense pas autrement. Il n'adore en aucune, façon l'objet, l'arbre, le rocher, la montagne, la grotte, etc., où sont enfermées les influences qu'il a l'intention de détourner à son profit. Il existe un lien personnel entre lui et le fétiche. On a souvent, dans le monde colonial, la mauvaise habitude d'appeler fétiche une effigie de terre, de bois ou de pierre, que l'on estime représenter une divinité. Ceci est loin d'être toujours exact. Le plus souvent, dans les pays soudanais, chaque famille a ses puissances protectrices, attachées dès l'origine, par un rituel compliqué, à un assemblage de diverses substances qu'a groupées et sensibilisées, grâce à des incantations et à des sacrifices, un voyant-de-choses-cachées. Ces puissances sont maintenues et accrues par l'être qu'elles protègent, au cours des cérémonies annuelles, ou à l'occasion de quelque consultation. Le support de vertu magique ainsi constitué est d'ordinaire enfermé dans une peau de bouc et tenu dans une case sacrée où seul pénètre le propriétaire du fétiche. L'influence propitiatoire est liée à la PERSONNE possesseur et aux gens de son entourage. Il est des mots ou des gestes qui interrompent cette action, que d'autres mots ou d'autres gestes rétablissent. Qu'un étranger s'empare de l'objet sacré, la vertu de ce dernier se dissipera à l'instant. Le lien s'est rompu. En vérité, le noir croit que chaque chose en ce monde, chaque aspect de la nature possède un pouvoir propre, une sorte d'âme confuse, qui n'arrive à s'individualiser que si un lien psychique est établi par des procédés spéciaux entre lui et un homme. Tout est animé ici-bas. Il y a une volonté obscure dans l'objet, l'être, l'ombre même. Le noir ignore nos dieux, nos religions, nos métaphysiques. C'est un paysan rusé qui ne demande à ses fétiches que de lui assurer la sécurité, la prospérité et la santé. Il ne se soucie en aucune façon d'un créateur ou d'un rétributeur. Il faut qu'il incline à lui rendre service les forces dont il s'est rendu maître par la stricte observance d'un rituel. Par des correspondances analogiques il sollicite, dans la forme la plus favorable, leur aide. Il existe des signes concrets entre les influences et lui. Parmi les entités qu'il lui convient de fléchir, les plus importantes sont le Ciel, le Soleil et la Terre. La Terre enfante et nourrit les générations d'hommes, d'animaux et de plantes, elle garde les morts et en refait de la Vie. Mais pour remplir ce rôle, elle doit être fécondée par le Ciel qui, au temps propice, s'unit à elle par l'intermédiaire de la tornade, au milieu du jaillissement embrasé des éclairs. Chaque année, à l'ouverture de la saison d'hivernage, sont célébrées les fêtes collectives qui rappellent le Ciel à ses devoirs de male. Les grands autels coniques reçoivent des libations de farine de mil, et sont arrosés du sang des bêtes de sacrifice. Pour que la contrainte soit plus impérieuse, en certains endroits un être humain est égorgé. Aux falaises de Bandiagara, devenues le refuge de très anciennes peuplades refoulées par les Mossis, il y a sept à huit siècles (quand ils envahirent la partie méridionale de la Boucle du Niger), les hogons, personnages sacrés qui gouvernent les tribus en conformité des coutumes ancestrales, ne manquaient point, dès qu'arrivait le temps de la frairie saisonnière, de rougir l'autel de sang humain. L'hostie abattue était dépecée menu et mêlée à des chairs d'animaux. Au cours des danses rituéliques nocturnes, chaque adulte approchait à son tour du vase sacré, y plongeait la main, saisissait au hasard un morceau de viande et le dévorait. Cette cérémonie de communion avait pour effet de renforcer, bon gré mal gré, l'alliance de la Terre et de l'homme et de rendre irrésistible l'appel du sol aux pluies fertilisantes. Les gens des falaises prétendent d'ailleurs que, depuis la conquête française, ils ont renoncé à ces pratiques. Je ne suis pas convaincu que leurs protestations correspondent à la réalité. La brousse a ses secrets et ne les communique pas au Blanc, qui est toujours de mauvais augure. Il existe, entre certains hommes privilégiés et les entités dont l'activité est détournée au service d'un individu ou d'un groupe, une sympathie évidente. Les intermédiaires sacrés entre des volontés qu’ils contraignent, par procédé magique, de collaborer sont de deux sortes. Les uns, que nous appelons des sorciers, font appel aux énergies du monde invisible pour s'assurer des avantages aux dépens de leurs voisins et à l'insu de ceux-ci. Les autres, qui sont les diseurs des choses cachées, ont, par double vue, la révélation des manigances des sorciers, dénouent les sortilèges, attirent les énergies favorables, protègent, par des procédés appropriés, l'individu ou la collectivité contre les malheurs susceptibles de les atteindre, prescrivent et surveillent l'exécution des rites. Il faut se garder de l'opinion commune, qui attribue aux jeteurs de sorts et aux thaumaturges noirs l'hypocrisie d’un exploiteur de la crédulité humaine. Dans des ouvrages, par ailleurs sérieux, sur l'ethnologie africaine, il est traité souvent avec légèreté, sur un ton à la fois badin et suffisant, des manigances qui permettent aux conjurateurs africains de vivre aux dépens d'une foule abusée ; on les qualifie de charlatans. Dans la loi que les blancs ont imposée à la brousse, leurs pratiques sont réprimées avec sévérité, parce que cette loi punit les imposteurs. Il est d'ailleurs désirable que cette loi, qui est utile à notre politique, ne soit point abolie. Quand on vit longtemps dans l'intimité des noirs, on apprend que leurs thaumaturges et leurs sorciers sont d'entière bonne foi et convaincus de posséder des pouvoirs exceptionnels sur la nature. Pour que soit reconnue leur qualité de truchement entre l'invisible et eux, il faut qu'ils établissent les preuves de leurs facultés psychiques, Les vieillards qui désignent le hogon, dans les falaises de Bandiagara, portent leur suffrage sur l'homme «qui leur paraît posséder des facultés supra-normales le mettant avec facilité en relations avec le monde invisible; un collier composé de trois boules, provenant d'un tombeau très ancien, est par leurs soins caché dans la brousse; celui des candidats qui, après s'être mis en état d'extase, voit l'endroit où est le collier et va le chercher, est agréé comme hogon», Le don de clairvoyance a les mêmes caractères chez les noirs que chez les blancs. Il est utile au psychologue qui veut entendre quelque chose à la mentalité des africains, de fréquenter au préalable dans les milieux populaires des pays civilisés. Les gens des classes adonnées au labeur manuel, en Europe, ont leurs fétiches, leur magie, leur médecine, leur thérapeutique, leurs coutumes, qui diffèrent profondément des croyances de la classe savante. Ils consultent les somnambules, les rebouteux, les devins ; redoutent à l'extrême le jet du mauvais sort et croient, dur comme fer, à la sorcellerie. Le noir, qui est un paysan, a la mentalité du paysan et de l'ouvrier d'Europe. Très mal défendu contre la maladie et la famine, il est hanté, de sa naissance à sa mort, par la terreur du sorcier. Si la pluie ne tombe pas, ou tombe avec irrégularité ; c'est que des malléoles l'ont chassée. Si une créature humaine, dans le village, languit, sous les atteintes d’un mal inconnu, c’est qu’un sorcier lui mange le cœur. Si elle meurt de cette maladie suspecte, si quelque animal sauvage, en brousse, l'a tuée, c'est sans doute que le sorcier est venu à ses fins et par des moyens psychiques a tiré, pour s'en repaître l'âme et le sang de sa victime ; ou bien il a emprunté les apparences de l'animal pour abolir une existence. Si le défunt a trépassé au loin, le chef de clan consultera ses fétiches, après leur avoir sacrifié, et leur demandera la confirmation de ses soupçons et le nom du coupable. Si le défunt est mort dans sa famille, le chef de village assemblera les habitants sur la place ; on célébrera la cérémonie appelée la promenade du cadavre ; le défunt désignera lui-même, en contraignant les porteurs du corps à se diriger dans une direction déterminée, l'être ou la chose dont les influences délétères l'ont meurtri. L'être maléficient n'est pas toujours conscient d'épandre le malheur autour de lui. C'est parfois à son insu qu'il ravage la contrée. De son corps s'échappent des effluences vénéneuses. Dans une famille de notables, au Sénégal, le fils non encore sevré du chef de clan tomba brusquement malade, s'affaiblit peu à peu et mourut. Les voyants de la région déclarèrent aux parents qu'une vieille servante, ou, pour mieux dire, une esclave de case, fort dévouée à ses maîtres, avait, par les fluides malins qu'elle exhalait, provoqué la fin précoce de l'enfant. La captive apprit que la rumeur publique l'accusait d'être sorcière. Elle en fut très affectée. Le maître l'envoya résider chez un de ses proches, dans un hameau de culture. Quelque temps après un enfant y mourait. On, attribua ce nouveau décès à l'action délétère de la vieille. Elle se défendit avec énergie d'être une jeteuse de sorts. « Je sais bien que tu ne veux pas la mort de nos petits, lui dit le chef, mais il y a en toi un esprit qui est plus fort que ta volonté. Je ne te chasse point ; tu iras à la ville vivre des secours que je te donnerai. » A la pensée de se séparer de la famille qu'elle aimait, elle éprouva une crise de désespoir et se jeta dans un puits où elle se noya. Comment les pouvoirs psychiques s'attachent-ils à un être ? Les facultés de clairvoyance, le pouvoir de nuisance sont parfois innés. Ainsi, dans les pays civilisés, certaines personnes possèdent de nature les qualités de médium, la double vue, et vaticinent avec plus ou moins de succès. Le plus souvent, chez les noirs, la faculté d'agir sur les entités invisibles s'acquiert soit au prix d'argent, soit par un entraînement spécial dirigé par quelque thaumaturge. Il s'agit, dans ce dernier cas, d'un enseignement purement empirique. L'animisme des noirs ne compte point de corps de doctrine, mais des procédés, des secrets de métier. Lorsque le garçon est agrégé à la caste des guerriers, soit à l'occasion de la circoncision (ce rite n'est pas en usage chez tous les animistes) ; lorsque la fillette est admise à faire partie de la caste des femmes (et souvent ce passage est marqué par le rite de l’excision), ils sont soumis à une retraite sacrée et observent alors un cérémonial très strict qui comporte des chants, des danses, une nourriture spéciale et restreinte, des coups, des exercices inhabituels. Les formules qui leur sont communiquées sont d'utilité pratique et n'ont d'autre but que de les initier à l'art du bonheur. Autour des feux du soir, et dans les causeries de la case et du marché, les noirs apprennent ce que savaient leurs pères, les légendes, les contes d'animaux, les dictons : les coutumes de la localité, les bonnes ruses qui permettent de tromper les esprits et les hommes, les artifices dont il est loisible d'user pour se les rendre favorables et s'en faire des alliés contre l'ennemi. Pour le noir, il n'existe pas de barrière entre ce bas monde et l'autre. II vit en familiarité avec les petits dieux et l'esprit des morts, et cette familiarité va parfois jusqu'à l’obsession ; ils sont là, qui l'entourent, réagissent à ses actes, à ses paroles : le conseillent, le récompensent, le châtient, mais obéissent à ses ordres s'il sait mettre en jeu les influences attachées aux objets et aux êtres de la nature. C'est grâce à ces êtres de l'invisible, dont l'action se manifeste à lui par des signes qu'il connaît, qu'il domine parfois les sortilèges des nécromants. L'être vivant est un personnage complexe ; les idées des noirs à ce sujet rappellent celles des Égyptiens pharaoniques telles qu'il nous est possible de les connaître par le témoignage des monuments et des papyrus. II convient ici de se défier de la terminologie habituelle à nos psychologues ; elle n'a point d'équivalents dans les dialectes noirs. Nos mots : âme, esprit, conscience, etc., sont intraduisibles pour eux, et les vocables dont nous usons pour interpréter leurs conceptions les restituent avec une fidélité douteuse. L'être se compose : 1° du sentiment qu'il a de son identité ; c'est l'âme, qui est immortelle et connaît par intuition les réalités de l’invisible ; 2° d'un corps matériel qui l’enveloppe ; 3° d'une entité dont l'aspect est, pour le voyant, identique à celui du corps. C'est le double, le siga (pl. sissé, en mossi). Tout ce qui existe au monde, la créature vivante, animal ou plante, la montagne, la pierre, le nuage, l'objet quelconque, possède un siga. Les dieux se nourrissent du siga des offrandes qu'on leur fait. Chez l'homme, un lien subtil attache le double au corps. « Pendant la nuit et durant le sommeil de l'individu, écrit M, Labouret, le double quitte son enveloppe charnelle comme un serpent ferait de sa peau et mène pendant quelques heures une existence personnelle, court les aventures, se livre à des travaux, rencontre d'autres doubles avec lesquels il converse, se dispute ou se bat. On ne saurait dire que cette vie soit indépendante, car le corps en connaît les péripéties par le rêve ; il en subit aussi les inconvénients, puisque les fatigues éprouvées et les blessures reçues par son double l'affectent et sont même susceptibles de le faire mourir ». Les sorciers sont sans cesse à la chasse des sissé, qu'ils tuent avec leurs haches magiques et dont ils se repaissent. L'être ne résiste pas à la mort de son double et meurt peu après lui. Parfois le double se détache de l'individu et le suit, perceptible seulement au regard des voyants. Un tel abandon est d'un présage funeste ; 4° du principe vital qui permet au corps de vivre, et l'anime dès la conception. Certains groupements noirs supposent qu'il est établi dans le foie. Après la mort, l'homme devient un dieu mâne ; le Kima, le dieu mâne, a quelque peine à se détacher des lieux où, incarné, il a vécu. Il reçoit avec plaisir les hommages de la famille, en est le conseiller écouté, agrée les offrandes qu'on lui fait, se réincarne souvent dans le ventre d'une femme de son clan ou d'un clan voisin, hante des animaux, qui, à l'occasion, deviennent les instruments de ses haines ou de sa bienveillance ; il est à l'occasion contraint, par des moyens magiques, de s'attacher à un objet sacré, corne, pierre sacrée, fétiche ; on lui rend, alors, par des sacrifices, sa captivité douce. Le sacrifice permet, en effet, à l'entité de dévorer le siga d'une créature. Parfois il s'attarde longtemps parmi les vivants. Mais il se réincarne toujours au plus tôt, s'il n'a pas achevé sa tâche sur la terre, c'est-à-dire s'il meurt pendant son enfance ou sans avoir créé une famille. Enfin, un jour où l'autre, il gagne le pays des ancêtres, où les conditions de l'existence sont à peu près les mêmes que sur la terre, Les noirs ne croient nullement qu'à sa mort l'homme se transforme pour une fin morale, s'améliore ou se pervertisse, soit voué au bonheur ou au malheur éternels, se repente ou s'obstine. Le défunt demeure simplement ce qu'il fut pendant la vie, ayant les mêmes désirs, animé des mêmes passions. C'est sur le double ou siga qu'agit le sorcier, après avoir lui-même quitté son corps. Le sorcier en état d'errance est toujours cannibale ; il hante la brousse et s'introduit dans les cases pour manger le double des hommes. Les sorciers se réunissent en assemblées, mettent en commun leurs victimes, se communiquent leurs secrets, constituent des réserves de vivres en cachant dans la brousse les doubles volés. Souvent les sorciers se métamorphosent en animaux féroces, pénètrent dans les villages, enlèvent des animaux, des enfants ou des femmes. Les hommes-panthères, les hommes-lions, les hommes-hyènes dévastent parfois les agglomérations indigènes ; ce sont sans doute des hallucinés, mais les meurtres qu'ils commettent sont trop réels. On a envoyé devant les tribunaux des hommes qui, armés de griffes de fer, confessaient avoir la faculté de se transformer la nuit en félins dévorateurs de gens. Le sorcier, à l'occasion, sacrifie à ses appétits le siga de sa propre famille. Par des procédés magiques, le thérapeute interrompt l'œuvre mauvaise, châtie le sorcier ; si celui-ci se cache, le féticheur le reconnaîtra ; le rite du poison d'épreuve est commun à la plupart des races africaines. Si …envoute son ennemi ou l'ennemi d'un de ses …. réussisse et que le volt atteigne son but Il …à lui, le volt se retournera contre lui…est soupçonné, le sorcier est surveillé par…. et devient, le cas échéant, leur victime. « J’ai été témoin dans ma jeunesse, me narre un jour en confidence un interprète samo, d'un fait de sorcellerie qui se passa dans mon village natal. Une vieille femme avait l'habitude, chaque nuit, de se dépouiller de sa peau, de la cacher sous son grenier à mil et de rejoindre dans la brousse l'assemblée des sorciers. Cette vieille était très méchante. Elle avait livré sa famille entière à ses collègues les autres sorciers ; en conséquence, elle était seule au monde. Le Hasard fit qu’un de ses voisins s'aperçut de son manège. lI prépara un grand pot de poudre de piment. A minuit, après le départ de la vieille pour le sabbat, il pénétra chez elle, fouilla partout et découvrit enfin la peau de la sorcière. Il en saupoudra l'intérieur de poudre de piment, la remit en place et retourna au logis. Quand la vieille revint à sa case, elle se glissa à nouveau dans sa peau. Mais le piment lui brûla la chair de telle sorte qu'elle pleura et hurla jusqu'au matin. Le voisin avisé accourut et derrière lui les gens du village. Accroupie au fond de sa case, la vieille ne cessait de gémir ; les poules picoraient quelques graines de piment qui avaient chû sur le sol, lorsque la sorcière rentra dans sa peau. Et le voisin avisé de s’écrier : « Maintenant nous te connaissons !» II exposa aux gens du village ce qu'il avait vu pendant la nuit et la cause des souffrances endurées par la vieille. Et l'auditoire… avec lui qu'il était indéniable que la vieille…. sorcière. On la tua ». D’une……… du monde noir, au Congo comme au …………. Cafres ou en Afrique orientale, en……………… diversité des dialectes, se décèle un fond ………….idées sur la magie et la sorcellerie. Ordre des attaques, procédés de défense, consultation des être invisibles, bénévoles ou malévoles, attachés aux choses et aux gens, sont mis en œuvre partout d'une façon à peu près identique. Il semble que les grands noirs ne soient pas très anciens en Afrique ; leurs migrations, dont ils ont conservé le souvenir (M. Delafosse croit qu'il y a eu deux invasions, séparées par l’intervalle de temps considérable), étaient dirigés de l'est à l'ouest. Le pays, avant leur arrivée, était occupé, semble-t-il, ici par des négrilles, là par des pygmées, à qui ils se mêlèrent. La légende des anciens habitants apparaît constamment dans le folklore et dans l'art magique. Certaines opérations ne peuvent être accomplies que par un représentant des anciens possesseurs du sol, plus proches de la Terre divinisée que les conquérants. Il est même probable que les nains mythiques et invisibles qui se cachent dans les trous de roches, les anfractuosités des arbres, les fourrés et les lieux déserts de la brousse sont les descendants des vieux autochtones disparus à l'époque des invasions. La consultation des esprits errants ou des mânes est opérée selon les méthodes qui sont mises en pratique chez les civilisés, dans les milieux spirites. Le féticheur, le thérapeute perd, pendant un temps plus ou moins prolongé, le contrôle de son activité psychique ; il s'isole par la pensée ; il entre en état de rêve éveillé. Dans le jargon spirite, on dirait qu'il est en transe. En cette situation, il communique avec les entités de l'invisible qui empruntent sa personnalité et s'expriment par sa bouche. Le son de sa voix se transforme. Il n'est plus que le porte-parole d'un kinkirsi ou d'un défunt. Il attire à lui les esprits qui, dans l'obscurité, se meuvent autour du consultant, touchent à l'occasion les assistants, manifestent leur présence par des coups, des traces lumineuses, des sons musicaux, etc. Certains animaux sont en relations formelles avec les gens de l'autre monde. Ceux-ci les obsèdent, les hantent, les contraignent fileur obéir. Les forces, intelligentes d'outre-monde ont des reposoirs sur terre. Les montagnes, les grands arbres, les bosquets, les rivières sont parfois des divinités qui se déplacent, le cas échéant, la nuit. Chacun d'eux est un chef qui a sa famille et ses serviteurs. Souvent, par un lavage spécifique des yeux, le féticheur parvient à voir les êtres de l'autre monde. L'eau de lavage a été préparée avec divers ingrédients imprégnés de substances psychiques dont l'effet est de faire tomber les voiles qui empêchent l'homme ordinaire d'apercevoir les entités spirituelles. Souvent aussi l'initié use du miroir magique : eau dans une calebasse, liquide coloré dans le creux de la main, pierre brillante, charbon de forgeron, etc... Il devine ainsi pour quelle raison le profane vient le consulter. Certains devins allument une lampe et aperçoivent dans la flamme les entités qui répondront au consultant. Les peuples de l'invisible ne sont pas fatalement malveillants ; les démons qui le composent naissent, vivent et meurent comme nous ; parfois l'un d'eux abuse d'une femme et lui fait un enfant dont on remarque vite les allures étranges, le caractère d'inhumanité. Parfois aussi une démone s'accouple à un homme. Les créatures de l'autre monde possèdent des secrets redoutables qu'elles communiquent à l'occasion aux terriens qui leur sont sympathiques : ceux-ci peuvent alors s'entretenir avec les animaux, possèdent des armes magiques irrésistibles, s'initient à la science des talismans protecteurs et des gris-gris dont la poussière ou l'influence, envoyée d’un souffle ou d'un coup d'ongle dans la direction de l'ennemi, suffit de le rendre malade et à provoquer sa mort. Grâce à eux, on aperçoit des animaux-fantômes, les sorciers errants dont les doubles sont en quête de nourriture humaine, les mânes des morts. On peut agir sur ces spectres, les contraindre à exécuter des besognes d'esclaves, et à indiquer les formules nécessaires à la confection d'amulettes sans reproche. On maîtrise par eux le pouvoir des entités funestes, comme les Vampires, qu'ils appartiennent au monde visible ou à l'invisible. Certains, assurent les noirs, ont une puissance telle qu'ils vident à distance et sur-le-champ, par une opération irrésistible, une calebasse, un melon, une mangue, de son contenu et réduisent le fruit à l'écorce. Nous avons dit que l'autre monde était peu différent du nôtre. On y conclut des mariages, on s'y unit par des liens d'affection. Et voici qu'il arrive qu'un des conjoints s'en retourne à la Terre, tout comme il advient sur terre qu'un adolescent meurt, appelé par on ne sait quel attrait mystérieux au Pays des Ancêtres. L’abandonné, dans l'un et l'autre cas, s'enquiert de l'infidèle et se met à sa poursuite. Cette croyance a permis à Dim Delobson d'écrire sa touchante histoire de La douce mort d'un enfant. Une fillette ne résiste pas à l'appel de son mari du ciel et meurt précocement pour le rejoindre. Contre les requêtes de l'invisible, on lutte avec des armes magiques, procurées par les diseurs-de-choses cachées. Au surplus, amulettes et gris-gris sont indispensables aux noirs dont la vie est encombrée d'une, telle foule d'interdits et de présages, qu'ils ne sont jamais assurés de les avoir tous observés. Les marabouts errants ont ajouté les ressources de la magie arabe à celles, déjà si nombreuses, que possédaient les animistes. Ils tirent presque tous leur subsistance de la vente des amulettes ; dans la plupart des peuplades noires, le terme de marabout est synonyme de thérapeute. On le redoute bien plus qu'on ne l'aime. Des recueils de formules de magie arabe, crasseux à souhait, figurent dans la bibliothèque de voyage de ces pieuses personnes. Il y a eu d'ailleurs des imprégnations mutuelles entre les pratiques et il est parfois difficile de discerner ce qui appartient au monde sémite et ce qui relève de l'animisme. Il ne demeure plus en Afrique occidentale, après les expéditions féroces des grands almamis du XIXe siècle, à la fois convertisseurs d'infidèles, conquérants d'immenses territoires, ravageurs de chair et marchands d'esclaves, qu'un seul empire animiste, celui des Mossis. Il s'est constitué, vers le XIIIe siècle de notre ère, dans le sud de la Boucle du Niger, aux dépens de populations sans consistance, affaiblies par les guerres intestines séculaires, et connues sous le nom de Gourounsi, de Nioniossé et de Kibissi ; les conquérants étaient des chefs de bandes originaires de la région de Gambaga, au N.-E. de la Gold Coast. Dim Delobson a exposé, dans son livre L'Empire du Mogho-naba, les péripéties légendaires de la création du nouvel État, les fastes de ses souverains, les détails de son organisation féodale très serrée, très hiérarchisée et qui lui permit de se maintenir à travers les âges jusqu'à la conquête française. Les Mossis s'étaient établis dans les cercles actuels de Tenkodogo, Ouagadougou, Kaya et une partie du cercle de Ouahigouya; ils avaient refoulé vers le Haut-Dahomey les Baribas autochtones (dans le cercle de Fada) et rejeté vers le nord les Kibissi qui se réfugièrent dans les falaises inaccessibles de la haute Boucle du Niger, où on les retrouve, de nos jours, sous le nom de Habé (mot qui signifie païens en langue poular). L'expansion des Mossis vers les territoires du nord fut considérable aux premiers siècles de l'empire. Ils occupèrent même Tombouctou et Oualata, et l'on découvre encore des colonies mossis aux limites des grands terrains de parcours des Touareg, dans le pays de Hombori. Les Nioniossé se fondirent avec les envahisseurs du commun pour constituer le peuple Mossi. Ce dernier était gouverné par ses nabas, ou nobles, qui dépendaient d’un potentat : le mogho-naba. Celui-ci s'installa de bonne heure à Ouagadougou. De bonne heure aussi se produisirent des scissions, dont la cause était due avant tout à l'extrême éloignement du pouvoir central : les Mossi de Fada formèrent un royaume particulier, ceux de Yatenga (cercle de Ouahigouya), se déclarèrent indépendants de Ouagadougou ; et bientôt il n'exista plus que des rapports de courtoisie entre le naba-kom de Tenkodogo et le mogho-naba. La France, en occupant ces territoires, en a maintenu l'armature féodale, qu'elle a dépouillée de ses extrêmes rigueurs et des coutumes contraires aux lois des états civilisés. Le mogho-naba, affermi sur son trône, a des pouvoirs plus spirituels encore que temporels ; il est une sorte de dieu porte-bonheur sur la terre et, à ce titre, astreint à un cérémonial compliqué ; les détails de l'autorité sont exercés par ses grands ministres, dont certains sont des hommes d'une remarquable intelligence. Chaque mossi a sa place marquée dans cette société, qui s'élève du chef de famille au mogho-naba, en passant par les intermédiaires des chefs de quartier, du chef de village, du chef de canton, du chef de province, pour aboutir au souverain, dont la Cour connaît elle-même un ordre de subordination. La magie a joué naguère un grand rôle dans l'empire mossi. Chaque naba avait auprès de lui un prêtre du poëré, révélateur de choses sacrées, et qui avant tout l'informait, grâce à un miroir d'eau magique, des sentiments et de la conduite de ses femmes, de ses proches, de ses pages, des gens du pays. Les gens du commun peuvent se faire initier aux sociétés secrètes qui pratiquent le vieux rituel des autochtones ; on y acquiert le don de double-vue, le moyen de s'extérioriser, les armes psychiques qui permettent de triompher d'un ennemi, la faculté de transformer son double en animal dès qu'il est menacé d'un danger, le pouvoir de déchaîner la tempête et de faire tomber la pluie. De leur côté les Manding ont importé maintes pratiques de leur groupe ethnique, les pébré en particulier, chez les Mossis. Certains féticheurs sont en renom dans tout l'Empire mossi. D'autres ne sont connus que dans leur canton. Ils ont des disciples et leur enseignent, contre rémunération en argent, en travail, en femmes, les prestiges de leur art. Ils produisent, dans les cercles indigènes, les mêmes phénomènes que les fakirs des Indes : faire par exemple germer et pousser en tige un grain de mil sous un bonnet ; la tige grandit à vue d'œil et donne un épi qui mûrit ; un oiseau sort de l'invisible et vient manger ce mil, etc... La foi des indigènes dans les pratiques magiques est profonde ; qu'ils se convertissent à l'islam ou au catholicisme, ils demeurent avant tout animistes, se couvrent d'amulettes et sacrifient en secret aux fétiches, aux esprits de l'au-delà, aux mânes des ancêtres. L'art magique, la psychologie du magicien, celle du sorcier, la pratique des conjurations ont été assez mal étudiés dans les milieux scientifiques. On a considéré leurs tenants comme des charlatans, des naïfs ou des faibles d’esprit ; l'opinion que l'on a d'eux est exagérée, du moins en ce qui concerne les populations africaines. La formation intellectuelle des Européens lettrés ne leur permet pas toujours de comprendre les raisons du noir ou du berbère. Il y avait au temps des maures d'Espagne, des écoles et des maîtres de magie ; les formulaires empiriques qu'ils ont laissés n'ont jamais été élucidés ; on y voit d'informes et absurdes recettes où sont entassées pêle-mêle des figures et des lettres arabes. Or ces formulaires avaient leur fondement dans le calcul numérique ; chaque lettre a une valeur de chiffre ; ceci est commun aux langues hébraïque et arabe ; mais la notation des lettres arabes, en magie, n’est plus celle du commun ; elle est réservée aux initiés et diffère complètement de l'autre. Je n'ai point vu marquer cette différence, qui est capitale, dans le savant ouvrage du regretté Doutté sur La Magie et la Religion dans l'Afrique du Nord. Au surplus le talisman, comme n'importe quel procédé de la magie, est un support de volonté individuelle — et n'est que cela. Il constitue une sorte d'accumulateur, qu'un médium aux pouvoirs psychiques étendus a chargé de son énergie personnelle et d'influences empruntées à certaines substances. Extérioriser ces fluides et les attacher à un objet, les choisir et les mettre en œuvre composent l'art magique. De même, le spiritisme, chez les Blancs, assemble et dirige certaines énergies nerveuses de l'être humain, manifestations où les défunts n'interviennent nullement. La foi est génératrice de miracles. Le miracle est toujours la conséquence d'un acte magique : la volonté d'un être triomphe de l'énergie des choses. Le magicien noir est convaincu, autant que son client, que son pouvoir psychique est une puissance dynamique et paralyse les forces ennemies. Ce pouvoir psychique lui est propre et nul ne peut se substituer à lui pour l'exercer. C'est ce que veut dire Dim Delobson, au début du chapitre des maléfices, quand il prévient le lecteur qu'il n'a point à espérer de succès à appliquer les recettes données par son livre, qui est, pour ceux qui savent lire, un formulaire de sorcellerie, un véritable traité des poisons psychiques : les philtres ne peuvent être fabriqués avec succès par un tiers ; il y a dans cette affaire de gris-gris ce qu’on appelle le droit de propriété. Il revient plusieurs fois sur cette idée dans le cours de l’ouvrage. Un gris-gris ne vaut que par l’approvisionnement fluidique dont le charge l'opérateur, initié au cours d'une cérémonie qui compte des sacrifices et des conjurations. Il est très appréciable, pour les ethnologues, que ce recueil ait été composé par un indigène du pays mossi. Dim Delobson est un noir distingué, très instruit, très intelligent, très francisé, qui occupe à Ouagadougou un emploi important dans l'administration française. Il appartient à la caste des nobles et est le fils du naba de Sao. Nul ne connaît mieux que lui les traditions de son pays. Il a déjà publié, à Paris, un remarquable ouvrage sur L'Empire du mogho-naba. Je l'ai sollicité de donner une suite à ce travail et de composer le tableau des croyances et pratiques rituelles du Mossi. Son enquête a été précise et minutieuse. Dim Delobson est d'une bonne foi absolue. Je le connais de longue date et sais qu'on peut avoir en lui pleine et entière confiance. Le document apporté par lui à la science européenne est donc de premier ordre, parce qu'il provient de la source la plus sûre. L'auteur ignore tout de Frazer et de son école, et toutes les théories contemporaines sur l'origine et les fondements de la magie. Aucune théorie, aucun parti-pris de doctrine ne s'est interposé entre les faits et son témoignage. Celui-ci comporte donc un élément de certitude qu'on rencontre bien rarement dans les récits des voyageurs et dans les livres didactiques des savants de cabinet. » ROBERT RANDAU

In Les secrets des secrets des sorciers noirs
Dim Dolebsom

@

Adresse

Rapaogtaaba. Philos
Bobo Dioulasso
KOMB-78485851

Notifications

Soyez le premier à savoir et laissez-nous vous envoyer un courriel lorsque Cabinet de Lecture publie des nouvelles et des promotions. Votre adresse e-mail ne sera pas utilisée à d'autres fins, et vous pouvez vous désabonner à tout moment.

Contacter L'entreprise

Envoyer un message à Cabinet de Lecture:

Partager